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Histoires Web lundi, juillet 8
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Au cœur du village de Saint-Seine-en-Bâche (Côte-d’Or), dans sa maison digne d’un hôtel particulier flanquée d’un terrain arboré de plusieurs hectares, François Saint-Aubin semble couler une existence tranquille. En apparence, du moins. Car depuis soixante ans, une affaire hante son esprit : celle de la mort de son frère aîné, Jean-Claude Saint-Aubin.

Le 5 juillet 1964, sur la route des vacances, le jeune homme de 23 ans, accompagnée de son amie, Dominique Kaydasch, elle aussi tuée dans l’accident, percute un platane à bord de sa Volvo sport noire à toit blanc, dans le lieu-dit Les Esclapes, près de Fréjus (Var), sur la nationale 7. « Ce n’est pas un banal accident, refuse toujours de croire François Saint-Aubin. Mon frère conduisait trop bien, la route ne présentait aucun danger. Quelque chose a provoqué sa sortie de route. »

Cette conviction ne quittera jamais la famille Saint-Aubin. En particulier Jean et Andrée Saint-Aubin, les parents de François et Jean-Claude, lesquels batailleront jusqu’à leur mort, quatre décennies plus tard, pour révéler ce qu’ils pensent être un mensonge d’État. « L’affaire Saint-Aubin » sera marquée par une succession d’incohérences, d’erreurs et de faux dans les investigations menées par les gendarmes et la justice.

Registre falsifié, documents disparus…

« On a l’­impression d’avoir été continuellement menés en bateau », fulmine François Saint-Aubin, qui n’a cessé d’être présent aux côtés de ses parents dans cette « lutte pour la vérité ». Pendant presque vingt ans, les enquêtes débouchent sur la même conclusion : Jean-Claude, qui roulait trop vite, a perdu le contrôle de son véhicule. Fin de l’histoire. « Mais pour nous, c’était tout sauf terminé », poursuit François Saint-Aubin.

Quelques semaines après l’accident, une pompiste près de Fréjus leur livre une confidence surprenante : un militaire du coin l’aurait informé qu’un ancien harki, prénommé Mohamed Moualkia, avait été témoin du drame. Il se rendait sur son lieu de travail, à 200 mètres de là. Dans son enquête, la gendarmerie a pourtant bien auditionné les voisins autour du lieu de l’accident. Tout le monde a entendu le bruit du choc, mais personne n’a rien vu. A l’­exception, donc, de Mohamed Moualkia : l’homme aurait aperçu un camion militaire barrer la route de la Volvo, suivi d’une 203 frappée d’un insigne officiel bleu, blanc, rouge.

Sauf que le registre des heures de présence de l’entreprise où travaille Moha­med Moualkia indique que le salarié a pris son poste à 5 heures, et non à 7, et ne pouvait donc pas être présent au moment de l’accident. « Mais on a découvert plus tard qu’il embauchait bien à 7 heures ce matin-là, confie François Saint-Aubin. Le registre a été grossièrement falsifié. » Ce que confirme un rapport établi par un huissier.

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