C’est peut-être l’un des marqueurs de notre époque : la conviction de vivre dans une ère de chaos total, au point d’oublier que le mensonge, la tromperie et la manipulation sont vieux comme le monde. Dans Une histoire de la désinformation. Fake news et théories du complot des Pharaons aux réseaux sociaux (éditions Mimésis, 218 pages), publié mardi 24 juin, Michel Pretalli, professeur des universités en études italiennes à l’université de Franche-Comté, et Giovanni Zagni, journaliste de fact-checking en Italie, revisitent douze époques de l’histoire sous l’angle des mille et une façons de distordre la vérité, avec un constat implacable : sous différentes formes, souvent avec un autre rythme et d’autres enjeux, la désinformation a toujours existé.
Les deux auteurs font remonter le plus vieil exemple de tromperie à l’époque de Amenhotep IV, quatorze siècles avant notre ère. La ville alliée de Byblos, dans l’actuel Liban, est assiégée par des ennemis du souverain d’Egypte. Deux tablettes d’argile aux informations contradictoires lui parviennent alors. L’une d’elles, signée par ses adversaires, affirme que la peste, qui circule dans la ville, pourrait se répandre dans l’armée du pharaon si celui-ci décidait de la dépêcher sur place.
L’autre, signée par le roi de Byblos, Rib-Haddi, dément la présence de la maladie, tout en suppliant Amenhotep IV de lui envoyer des troupes en renfort. Laquelle dit vrai ? Les historiens l’ignorent. Néanmoins, les deux versions s’excluant, au moins une visait à manipuler le souverain d’Egypte, à la manière d’une « fake news », relèvent-ils, dans l’un des nombreux parallèles, parfois acrobatiques, qu’ils tissent entre le passé et le présent.
Il vous reste 75.27% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.