Après un signalement du député La France insoumise (LFI) Aymeric Caron, une enquête pour prise illégale d’intérêts a été ouverte au sujet du financement par Arte France des documentaires de Bernard-Henri Lévy, alors que ce dernier est président du conseil de surveillance de la chaîne, a appris l’Agence France-Presse (AFP), jeudi 13 février de source proche du dossier. L’enquête a été confiée à la Direction régionale de la police judiciaire de la Préfecture de police de Paris, selon cette source, confirmant une information de Médiapart.
« Il semble qu’Aymeric Caron a franchi une nouvelle étape dans la campagne de harcèlement qu’il mène, depuis un certain temps, contre moi », a réagi auprès de l’agence de presse « BHL », qui « compte porter plainte en dénonciation calomnieuse » contre le député « insoumis ». Aymeric Caron avait adressé le 5 février un signalement au nom de l’article 40 du code de la procédure pénale à la procureure de Paris, soupçonnant « une prise illégale d’intérêts » en lien avec « la régularité et l’importance des financements accordés par la chaîne au président de son propre conseil de surveillance ».
Bernard-Henri Lévy, président du conseil de surveillance d’Arte France depuis 1993, « a pu bénéficier, pendant ses 31 années de mandat, d’un soutien substantiel » de la chaîne « pour le financement de ses œuvres audiovisuelles et cinématographiques », soit « un montant cumulé de 750 000 euros » entre 2011 et 2022, précise le député dans son signalement consulté par l’AFP. Arte France a également soutenu « pour un montant non précisé » son film Le jour et la nuit (1997) « et acquis en 2004 pour un montant de 68 700 euros les droits de diffusion du film “Bosna !” dont M. Lévy fut le coauteur et le coréalisateur », ajoute-t-il.
« Aucune responsabilité ou prérogative éditoriale »
Dans un rapport parlementaire sur l’audiovisuel public en octobre et consulté par l’AFP, Aymeric Caron, rapporteur, avait souligné ces deux points de vigilance, estimant notamment que le financement de ses documentaires par Arte France soulevait « de fortes objections déontologiques ». « En acceptant de bénéficier, directement ou indirectement, d’un soutien financier d’Arte France » en tant que président du conseil de surveillance de la chaîne, « M. Bernard-Henri Lévy a gravement manqué aux devoirs de sa charge et doit, pour ce motif quitter ses fonctions », avait-il écrit, considérant qu’« un conflit d’intérêts aussi patent ne saurait durer ».
« Je n’ai aucune responsabilité dans le choix des programmes d’Arte. Je ne siège dans aucune des commissions qui choisissent les films qu’Arte diffuse ou produit. J’ai renoncé à toute rémunération pour les documentaires dont il est question et dont je suis l’auteur », s’est défendu Bernard-Henri Lévy.
« Le conseil de surveillance et son président n’ont aucune responsabilité ou prérogative éditoriale », a réagi, de son côté, la chaîne Arte auprès de l’AFP. « Au vu des informations dont nous disposons, le processus habituel et collégial de sélection des programmes a bien été respecté par les instances éditoriales de la chaîne, concernant le soutien d’œuvres écrites, réalisées ou coproduites par Bernard-Henri Lévy », a ajouté Arte France, soulignant que « l’indépendance éditoriale d’Arte n’[avait] été affectée d’aucune façon ».