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C’est désormais la priorité des autorités judiciaires néerlandaises : retrouver Jos Leijdekkers, 33 ans, alias « Bolle Jos » dans son pays ou « Omar Sheriff » en Sierra Leone, où ce trafiquant de drogue se serait réfugié après avoir sans doute résidé en Turquie. Condamné par contumace par un tribunal de Rotterdam, en juin 2024, à vingt-quatre ans de prison pour six transports de cocaïne vers les Pays-Bas et meurtre, il serait arrivé en Sierra Leone il y a plusieurs mois.

Un homme aperçu sur des photos prises le 1er janvier lors d’un office religieux qui se tenait en présence du président Julius Maada Bio, de son épouse et de sa fille, serait bien le fugitif, a indiqué, mardi 4 février, William Fayia Sellu, l’inspecteur général de la police sierra-léonaise. « La police a lancé une chasse à l’homme pour l’arrêter, elle s’est rendue dans plusieurs lieux mais il n’a pas encore été retrouvé », a-t-il déclaré. Ironie de l’histoire, les clichés (ainsi qu’une vidéo) ont été diffusés par la première dame elle-même, Fatima Maada Bio, sur sa page Facebook.

Les autorités néerlandaises redoutent que Jos Leijdekkers, présenté par Europol comme un acteur majeur du narcotrafic à l’échelle mondiale, ait fui ou bénéficie de protections dans ce pays où il aurait entretenu une relation avec la fille du président. Le chef de l’Etat nie toutefois connaître le trafiquant. D’après le consortium Follow the Money et le quotidien néerlandais Algemeen Dagblad, l’homme, immensément riche, aurait corrompu des membres du régime en leur offrant des voitures et des montres de luxe.

Lire le reportage (2023) : Article réservé à nos abonnés Dakar, nouvelle cible des trafiquants de drogue en Afrique de l’Ouest

Lors de son procès à Rotterdam, le procureur avait estimé que les importations de cocaïne qu’il avait organisées en 2019 et 2020 avaient pu lui rapporter de 70 à 140 millions d’euros. Notre « plus haute priorité » est « de le ramener pour qu’il purge sa peine », a indiqué un communiqué du parquet néerlandais fin janvier. Les autorités offrent 200 000 euros pour tout renseignement qui conduirait à son arrestation. Le 6 février, le ministre de la justice, David van Weel, a officiellement réclamé son extradition et dit espérer que les autorités sierra-léonaises « agiront rapidement contre la criminalité internationale ».

La communication entre La Haye et Freetown serait toutefois « difficile », indique une source néerlandaise, qui ne manque de rappeler que l’opposition au président Maada Bio dénonce régulièrement la corruption de son régime, mis en difficulté récemment lorsque la police guinéenne a saisi sept valises transportant de la cocaïne dans un véhicule de l’ambassade sierra-léonaise à Conakry.

Déplacement du narcotrafic

La situation est d’autant plus compliquée pour les autorités néerlandaises qu’elles ne possèdent ni ambassade ni consulat en Sierra Leone et qu’elles n’ont signé aucun accord de coopération judiciaire avec ce pays. C’est sans doute l’un des éléments qui ont amené « Bolle Jos » à choisir cette destination après l’arrestation de son beau-frère et de son frère en Turquie, fin 2023.

Le natif de Bréda, dans le sud des Pays-Bas, a sans doute aussi été impliqué, en 2019, dans l’enlèvement, la torture et le meurtre de Naima Jilal, 29 ans, l’une de ses rivales au sein de la mafia néerlandaise de la drogue. Une enquête le concernant est en cours en Allemagne, alors qu’il a déjà été condamné à dix ans de prison en Belgique. Dans ce pays, il risque une autre peine de quinze ans dans une affaire concernant un trafic de 17 tonnes de cocaïne au port d’Anvers, en 2023.

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En octobre de cette année-là, de la drogue en provenance d’Amérique latine avait transité par la Sierra Leone et avait été dissimulée dans de la farine de soja ou des fruits. Des opérations commanditées par Jos Leijdekkers. Sept trafiquants armés venus récupérer un butin d’une valeur marchande de quelque 250 millions avaient été appréhendés par des unités spéciales de la police belge.

Lire l’entretien : Article réservé à nos abonnés Trafic de cocaïne : « La Côte d’Ivoire est devenue un point de transit très important »

Les récents renforcements des contrôles dans les ports de Rotterdam et Anvers, principales portes d’entrée de la cocaïne en Europe, ont entraîné un déplacement du narcotrafic. A Rotterdam, 25,9 tonnes ont été interceptées en 2024 (contre 45,5 en 2023) ; à Anvers, les douanes ont saisi 44 tonnes en 2024 (126 en 2023).

Dès lors, la présence de Jos Leijdekkers en Afrique de l’Ouest n’étonne pas les experts néerlandais et leurs collègues des Nations unies. Cette région, où se sont installées diverses mafias latino-américaines et européennes, est devenue un centre de transit pour des cargaisons arrivées d’Amérique latine et réexpédiées ensuite ailleurs dans le monde. Plus de 126 tonnes de cocaïne ont été saisies dans la région depuis 2019, un chiffre qui serait très inférieur à la réalité du narcotrafic, selon divers spécialistes. Au hit-parade des pays de provenance des stupéfiants saisis à Anvers, la Sierra Leone a ainsi talonné l’Equateur en 2024.

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