Le 16 février 2024 mourait Alexeï Navalny, assassiné dans l’une des prisons les plus dures de Russie. Il y purgeait une peine de dix-neuf ans pour divers crimes, dont celui d’avoir fondé, en 2011, et dirigé une « organisation extrémiste », en l’occurrence la Fondation anticorruption, célèbre pour ses enquêtes sans concession sur les élites dirigeantes.
Un an plus tard, la machine répressive continue de tourner à plein régime. Toute voix critique est étouffée et les derniers vestiges de la société civile sont anéantis au nom de la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme. Cette campagne ne s’opère toutefois pas à huis clos : elle fait l’objet d’un suivi rigoureux, mené notamment par l’association OVD-Info.
En dépit des persécutions dont elle fait l’objet, cette organisation non gouvernementale (ONG) s’efforce de défendre les droits humains en Russie en collectant les données judiciaires et en offrant une assistance juridique aux victimes de l’arbitraire. Alors que le gouvernement russe est actuellement reconnu par Donald Trump comme un interlocuteur légitime pour négocier le sort de l’Ukraine, le rapport annuel que vient de publier OVD-Info jette une lumière crue sur l’étouffement des libertés à l’intérieur du pays.
Peines sévères
Le bilan est sombre. En dépit d’une légère réduction du nombre de poursuites pénales en 2024, la répression de toute voix critique se poursuit avec une brutalité renouvelée : au moins dix prisonniers politiques sont, comme Alexeï Navalny, morts dans leur cellule au cours de l’année 2024.
Le nombre de détenus politiques, en augmentation, se chiffre aujourd’hui à 1 500 personnes au minimum, sans doute beaucoup plus. La sévérité des peines infligées est choquante : dix ans de détention au moins pour plus d’un quart d’entre eux. Les deux tiers des personnes actuellement poursuivies pour des raisons politiques sont accusées d’avoir mené des activités extrémistes ou terroristes.
Que cachent ces incriminations ? Fréquemment mobilisée en 2024, l’accusation de « justifier ou promouvoir le terrorisme » sert par exemple à réprimer des gens qui, sur les réseaux sociaux, ont osé critiquer le gouvernement à la suite des attaques menées contre le pont de Crimée ou aux frappes de drones à Moscou. Et que dire d’Arseni Troubine, ce prisonnier politique âgé de 15 ans, qui a été condamné à cinq ans de détention pour avoir déposé des tracts anti-Poutine dans des boîtes à lettres ? Il a lui aussi été reconnu coupable d’avoir participé à une organisation terroriste.
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