« On se sent reluquées comme des bouts de viande », résume Léana (les personnes citées par leur prénom ont requis l’anonymat), surfeuse bretonne de 29 ans, pour décrire le sentiment qu’elle partage avec son groupe d’amies lorsqu’elles arrivent sur la plage, planche sous le bras, dans la baie de Trestel, dans les Côtes-d’Armor. « Et puis, en tant que fille, tu dois supporter des préjugés sur ton niveau, ajoute-t-elle. Régulièrement, des mecs qui sont en vacances et qui surfent trois fois par an se permettent de me donner des conseils, alors que je surfe toute l’année depuis presque quinze ans ! »
Mylène, la petite trentaine et une tignasse blonde relevée en chignon, ajoute : « Les gars, même débutants, ont souvent un complexe de supériorité vis-à-vis de nous, estime-t-elle. Et si tu as le malheur d’être lesbienne ou racisée, c’est encore plus dur de s’imposer. »
En entendant cela, Marc, son compagnon, qui écoutait d’une oreille en regardant des surfeuses sur le pic, la partie la plus haute de la vague, rejoint la conversation. Il ne se reconnaît pas du tout dans ce qui lui semble être une grossière caricature du « mâle alpha ». Ce qu’il pense des remarques désobligeantes subies par Mylène et les autres ? « Globalement, le niveau est meilleur chez les hommes », affirme-t-il, sous le regard éberlué de la jeune femme. Et quid de la sous-représentation des personnes racisées dans le surf ? « J’avoue que je n’ai pas le souvenir d’avoir croisé de surfeuse noire en France, en vingt-cinq ans de pratique. Et, honnêtement, je suis incapable de citer de surfeur pro racisé ou queer, c’est vrai. On a certainement des progrès à faire là-dessus », admet-il.
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