La situation était incertaine, jeudi 5 décembre, à Hama. Les groupes rebelles qui ont lancé une offensive dans la périphérie de cette ville, la quatrième de Syrie, ont déclaré avoir réussi à y pénétrer, avoir pris la prison et libéré des centaines de détenus. L’armée syrienne a pour sa part reconnu dans un communiqué avoir perdu le contrôle de Hama : « Au cours des dernières heures (…), les groupes terroristes ont pu percer plusieurs fronts dans la ville et y entrer », a-t-elle affirmé, ajoutant que ses forces s’étaient « redéployées hors de la ville ».
Située à 210 kilomètres au nord de Damas, la quatrième ville du pays est stratégique car elle se trouve entre la ville septentrionale d’Alep, tombée le 1er décembre aux mains des rebelles, et la capitale, fief du pouvoir de Bachar Al-Assad. Cette ville conservatrice de près de 1 million d’habitants est à majorité sunnite mais compte également une minorité alaouite dont est issu le clan Assad, au pouvoir en Syrie depuis plus de cinq décennies. Elle a été le théâtre d’un massacre perpétré en 1982 par l’armée sous le règne du père du président, Hafez Al-Assad, qui réprimait une insurrection des Frères musulmans. C’est aussi dans cette ville que se sont déroulées certaines des plus grandes manifestations au début du soulèvement favorable à la démocratie de 2011, dont la répression a déclenché la guerre civile.
En l’espace d’une semaine, et à la surprise générale, les rebelles emmenés par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir Al-Cham (HTC, Organisation de libération du Levant) se sont emparés de la majeure partie d’Alep, deuxième ville du pays, poursuivant leur lancée vers Hama, une ville stratégique pour le régime de Bachar Al-Assad car elle commande la route vers la capitale, Damas, située à environ 200 kilomètres plus au sud.
L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH, installé au Royaume-Uni mais qui dispose d’un vaste réseau d’informateurs dans le pays) a fait état de violents affrontements pendant la nuit dans la région du djébel Zein Al-Abidine, à environ 5 kilomètres au nord de Hama. « Les troupes gouvernementales mènent une résistance acharnée et tentent de stopper la progression des rebelles », a déclaré à l’Agence France Presse (AFP) le directeur de cette ONG, Rami Abdel Rahmane.
Bombardements de l’aviation russe et syrienne
Mercredi soir, une source militaire, citée par les médias officiels syriens, a affirmé que « l’aviation russe et syrienne et les forces d’artillerie et de missiles [avaient] mené des frappes concentrées sur les (…) terroristes » dans les environs de Hama.
Les affrontements déclenchés depuis le début de l’offensive rebelle sont les premiers de cette ampleur depuis 2020 dans un pays meurtri par une guerre civile dévastatrice qui a fait un demi-million de morts depuis 2011, et l’a morcelé en plusieurs zones d’influence, avec des belligérants soutenus par différentes puissances étrangères. La Russie et l’Iran, les principaux alliés de Damas, ainsi que la Turquie, un soutien majeur des rebelles, sont en « contact étroit » pour stabiliser la situation, a fait savoir mercredi la diplomatie russe.
Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, a, lui, mis en garde contre une résurgence du groupe Etat islamique en Syrie, où cette formation djihadiste avait proclamé un « califat » en 2014, à cheval sur l’Irak, avant d’être défait plusieurs années plus tard.
Depuis le début de l’offensive rebelle, le 27 novembre, les combats et les bombardements ont fait plus de 727 morts, parmi lesquels 111 civils, selon l’OSDH. L’ONG Human Rights Watch s’est alarmée des risques pour les civils, alors que les belligérants ont été accusés de violations des droits humains.
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Le coordinateur humanitaire régional adjoint de l’ONU pour la Syrie, David Carden, a déclaré à l’AFP que plus de 115 000 personnes avaient été déplacées en une semaine de combats. L’agence allemande DPA a annoncé la mort d’un de ses photographes, Anas Alkharboutli, tué dans une frappe aérienne près de Hama.