FRANCE 2 – MERCREDI 26 FÉVRIER À 23 H 00 – DOCUMENTAIRE
D’adorables porcelets rose clair grognent de plaisir à l’arrivée de la paille fraîche que leur apporte Olivier Tanguy, éleveur de porcs bio en Bretagne. Après un début de carrière en élevage industriel, marié et père de famille, il s’est donc lancé en 2018. Il a racheté un élevage de porcs traditionnels. Et il a investi – s’est endetté – pour passer au bio, comme l’Union européenne et l’Etat français encourageaient alors les éleveurs à le faire.
« Il y en a qui aiment les vaches, moi j’ai toujours été attiré par le cochon », dit-il. Olivier Tanguy y croit alors d’autant plus que la – fameuse – loi EGalim de 2018 est claire : « Au plus tard le 1er janvier 2022, les repas servis en restauration collective dans tous les établissements chargés d’une mission de service public devront compter (…) au moins 20 % de produits biologiques. »
Mais, quatre ans plus tard, les éleveurs de porcs bio subissent une crise inédite et se sentent abandonnés. Faute de contrôles suffisants, la loi EGalim n’est pas appliquée. Pour la première fois, les ventes de viande bio baissent, de 13 % en 2022. Et l’Etat se déjuge, affirmant que si les éleveurs n’arrivent pas à vendre tous leurs porcs bio, c’est qu’ils en produisent trop.
« Stress, angoisse »
Le réalisateur Eric Guéret connaît bien le sujet, qui agite actuellement le Salon de l’agriculture, à Paris jusqu’au 2 mars. Aussi, pour dénoncer cet abandon, il a filmé Olivier Tanguy dans la durée, au gré de ses activités quotidiennes. Comme lorsqu’il revient de la banque, où « ils sont sympas, ils ont gelé le prêt un an ». Mais Didier (Dédé), l’unique employé, n’est pas dupe. « Les banques lui ont donné un an. Et un an c’est court. (…) S’il lâche, il perd tout. » Lui aussi s’est converti au bio, parce que « les cochons, c’est pas parce qu’on les mange qu’on doit pas les respecter ».
Le téléspectateur fait ensuite la connaissance de Thierry, l’ancien propriétaire, d’Emmanuelle, l’épouse d’Eric Guéret, de Fabrice, un autre paysan bio parti manifester. « Les animaux sont propres, c’est du beau cochon, ça fait plaisir », se satisfait un matin un technicien venu inspecter l’élevage.
Olivier Tanguy évoque à plusieurs reprises « le stress, l’angoisse, la trésorerie dans le rouge ». Son épouse sous-entend qu’elle a déjà eu peur qu’il se suicide. « Un matin, Olivier pleurait », se souvient Didier.
« Trésorerie à sec »
La vie continue. La séquence sur la différence entre le lisier (liquide et ammoniaqué) et le fumier (solide, « c’est mieux ») peut paraître un peu technique ; le « départ » des cochons, un peu triste. Olivier retrouve brièvement le sourire, en découvrant un matin d’hiver 18 porcelets minuscules nés dans la nuit et totalement craquants.
Le printemps pointe. Olivier Tanguy croise des voisins. « La trésorerie est toujours à sec », dit-il. Sur un chemin, René Louail, responsable politique local, dénonce « la FNSEA, bras armé de l’agroalimentaire ». Près d’un talus, les plus jeunes se réjouissent de vivre dans un environnement moins pollué que leurs aînés.
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Dans sa note d’intention, Eric Guéret interroge : « Et nous, consommateurs, sommes-nous prêts à soutenir un système qui préserve notre santé et l’avenir ? » On ne sait pas si un tel film peut convaincre d’acheter du bio… ou de devenir végétarien.
Sur la paille, d’Eric Guéret (Fr., 2025, 73 min). Suivi d’un débat animé par Marie Portolano, avec Eric Guéret et Philippe Camburet, président de la FNAB (Fédération nationale d’agriculture biologique).