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Histoires Web jeudi, octobre 3
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Pareille annonce méritait bien trois « i » et des lettres capitales : « SURPRIIISE : NOUVELLE SÉRIE ! », a écrit Riad Sattouf, le 1er septembre, sur son compte Instagram. Ainsi informait-il ses quelque 315 000 abonnés, et le monde, de l’arrivée, le 8 octobre, du premier tome de Moi, Fadi, le frère volé, suite ou plutôt contrepoint à L’Arabe du futur, cette saga autobiographique en bande dessinée au phénoménal succès (Allary, 2014-2022). Le quatrième des six tomes avait révélé le secret qui en constituait le cœur : alors que la mère, française, de l’auteur, et ses trois fils vivaient en France, le père, syrien, avait enlevé Fadi, le plus jeune des garçons, et l’avait emmené à Ter Maaleh, son village, proche de Homs. La mère et les frères de Fadi n’ont pu revoir celui-ci que vingt ans plus tard, en 2011, après l’avoir fait venir en France au début de la guerre civile syrienne. L’ultime volet s’achevait sur ces retrouvailles.

Celles-ci ont été suivies par de longs ­entretiens entre Riad et Fadi Sattouf, qui fournissent la matière de Moi, Fadi, le frère volé, où le benjamin rapporte sa version, l’arrachement à sa mère, la découverte de la Syrie, l’apprentissage de l’arabe. Moi, Fadi… est, après Le Jeune Acteur, tome 1 (2021), le deuxième ouvrage publié aux Livres du futur, maison créée par l’auteur. Et une occasion de revenir avec lui sur son œuvre, récompensée en 2023 par le Grand Prix du Festival ­d’Angoulême.

Je

Au Centre Pompidou, l’exposition « Bande dessinée, 1964-2024 » (jusqu’au 4 novembre) accueille des planches de L’Arabe du futur dans la partie sur « l’écriture de soi ». C’est dire si Riad Sattouf aura marqué la manière de se raconter. Mais il s’illustre aussi dans ce que l’on pourrait nommer, à la suite de Pierre Pachet (1937-2016), des autobiographies d’autrui. Après avoir raconté à la première personne, dans Les Cahiers d’Esther, les histoires d’une jeune fille enwtre ses 10 et 18 ans (Allary, 2016-2024) et, dans Le Jeune Acteur, celles de Vincent Lacoste, il se fond ici dans la voix et la pensée de son frère. « Dans ce qu’Esther et Fadi m’ont raconté, explique-t-il au “Monde des livres”, il y a des choses très différentes de ce que je verrais à leur place, ou de ce que je penserais. Je ne vois pas comment je pourrais raconter ça à la troisième personne. Esther est beaucoup plus positive que moi sur beaucoup de sujets. Fadi m’a offert une autre vision de la vie en Syrie que celle que j’avais pu avoir, enfant. Mon commentaire sur ce qu’il a vécu n’était pas très inté­ressant, et il m’a semblé plus pertinent de l’écrire au “je”. » N’éprouvant pas de ­ « culpabilité mal placée » à l’égard de son prochain, il se sent libre de rapporter ces histoires comme il l’entend.

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