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Histoires Web mercredi, avril 16
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Livre. Il est facile d’ouvrir ce livre avec une certaine lassitude – encore un récit de comédienne mettant son intimité à découvert ; encore un témoignage d’actrice racontant les violences auxquelles son métier l’a exposée. Ces deux dernières années, l’exercice est presque devenu un genre à part entière. Pourtant, l’écriture d’Anouk Grinberg dans Respect emporte très vite le lecteur par sa simplicité déterminée, sa façon d’éviter les précautions et les détours, sa volonté d’aller droit au cœur du « mal » – notion évoquée dès la deuxième ligne du livre.

« Je shoote dans les secrets, je shoote dans les mensonges et les hypocrisies, annonce-t-elle d’entrée. J’explose le tombeau où j’étais endormie. » Et l’on tourne bientôt les pages le souffle coupé, impressionné par la capacité de l’autrice à démonter les mécanismes de l’engrenage « archétypal, banal, mondial », qu’elle illustre par sa propre vie : les atteintes sexuelles aux « conséquences indélébiles » dès l’enfance, la détestation de soi, le refuge paradoxal dans la condition de proie et la difficulté, voire l’impossibilité, de s’arracher à cette « spirale ». C’est une « cage de honte. Ça dure quelques minutes pour l’homme et une vie entière pour la femme ».

Pour l’artiste, comédienne réputée et peintre accomplie, ce chemin de souffrance commence par un viol à l’âge de 7 ans chez sa meilleure amie : il est commis par le beau-père de cette dernière, devant le visionnage d’un film. « Ce qui meurt ce jour-là ne reviendra jamais. » Il continue, à 12 ans, par un acte incestueux du frère aîné adoré, rapidement étouffé par une cellule familiale au fonctionnement chaotique. Tandis que la mère s’enfonce dans une maladie dépressive, le père – le dramaturge et homme d’affaires Michel Vinaver (1927-2022) – est absorbé par son intense activité professionnelle et sa passion du théâtre.

Le sexe, « une atrocité »

Pendant ce temps, les enfants grandissent trop seuls. Adolescente, Anouk Grinberg a des comportements sadiques avec son chat, serre contre elle un singe en peluche qu’elle a baptisé « Zizi » et s’imagine perdre sa virginité en se prostituant rue Saint-Denis. Pour la jeune fille qui se passionne soudainement pour la géologie, car elle « rêve de minéral, d’absence, de non-conscience », le sexe devient « une atrocité » qui n’a pas de rapport avec l’amour. Cela n’a jamais changé, même pour la femme de 62 ans qu’elle est aujourd’hui.

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