Des juges d’instruction parisiens ont ordonné, mardi 22 juillet, le renvoi en correctionnelle de la ministre de la culture et maire (Les Républicains) du 7e arrondissement de Paris, Rachida Dati, ainsi que de l’ancien patron de Renault-Nissan Carlos Ghosn pour corruption et trafic d’influence, ont appris Le Monde et l’Agence France-Presse de source judiciaire. Une première audience, prévue le 29 septembre, doit permettre de fixer la date du procès, qui pourrait se tenir après les élections municipales, prévues en mars 2026.
Les deux mis en cause contestent les accusations dans ce dossier instruit depuis 2019 à Paris et aux lourds enjeux politiques, Rachida Dati étant l’une des principales figures du gouvernement de François Bayrou et potentielle candidate à la Mairie de Paris. Carlos Ghosn est visé par plusieurs mandats d’arrêts internationaux et interdit judiciairement de quitter le Liban.
Malgré son renvoi en correctionnelle, Rachida Dati va rester au gouvernement, a fait savoir un proche d’Emmanuel Macron, confirmant une information de RTL : « Un renvoi n’étant pas une condamnation, [la ministre de la culture] poursuit son travail au gouvernement. »
Dans la soirée, lors de sa première prise de parole publique sur cette affaire, la ministre a confirmé qu’elle ne comptait pas démissionner. Sur le plateau de LCI, dans une charge violente, Rachida Dati a dénoncé une « procédure [judiciaire] émaillée d’incidents » et a mis en cause les magistrats qui ont instruit le dossier qui, selon elle, « marchent sur les droits de la défense ». « J’accable des magistrats qui refusent de faire leur travail selon le code de procédure », a martelé l’élue LR, documents à la main. Clamant son innocence et affirmant qu’elle ne « renoncerait sur rien », elle a également dénoncé une « instrumentalisation honteuse » de cette affaire par ses opposants politiques.
Rachida Dati multiplie, en vain, les recours
La ministre de 59 ans sera jugée pour « recel d’abus de pouvoir et d’abus de confiance », « corruption et trafic d’influence passifs par personne investie d’un mandat électif public au sein d’une organisation internationale », le Parlement européen. Rachida Dati est soupçonnée d’avoir perçu 900 000 euros – entre 2010 et 2012 – pour des prestations de conseil actées dans une convention d’honoraires signée le 28 octobre 2009 avec RNBV (filiale de l’alliance Renault-Nissan), mais sans avoir réellement travaillé, alors qu’elle était avocate et députée européenne (2009-2019). Les investigations ont aussi cherché à déterminer si cette convention d’honoraires avait pu servir à masquer une activité de lobbying au Parlement européen, interdite à tout élu.
Après avoir été initialement placée sous le statut plus favorable de témoin assisté, Rachida Dati a été mise en examen en juillet 2021. Elle considère ces faits comme prescrits, et a multiplié en vain les recours pour mettre fin aux poursuites. « Des recours sont toujours pendants, mais ne font pas obstacle à ce que les magistrats instructeurs rendent leur ordonnance de fin d’information », a souligné la source judiciaire.
Carlos Ghosn, 71 ans, est lui visé depuis avril 2023 par un mandat d’arrêt international dans ce dossier et sera jugé pour « abus de pouvoirs par dirigeant de société », « abus de confiance », « corruption et trafic d’influence actifs », dans un dossier où l’entreprise Renault s’est constituée partie civile. Il conteste l’ensemble des accusations. Celui qui possède les nationalités libanaise, française et brésilienne a été arrêté, fin 2018, au Japon, où il devait être jugé pour des malversations financières présumées quand il était à la tête de Renault-Nissan. Il a trouvé refuge au Liban fin 2019 après une fuite rocambolesque du Japon.