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Histoires Web mardi, septembre 23
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Il a livré un témoignage accablant contre Gaël Perdriau. L’ancien directeur de cabinet Pierre Gauttieri a accusé le maire de Saint-Etienne d’être celui qui « a pris la décision » de réaliser une « sextape » pour museler son principal rival, a-t-il déclaré, mardi 23 septembre, au deuxième jour du procès de l’édile.

Pierre Gauttieri, 57 ans, a passé dix ans aux côtés de Gaël Perdriau, dont il était le plus proche et le plus fidèle des collaborateurs. Depuis lundi, il lui tourne le dos dans la salle d’audience du tribunal correctionnel de Lyon, où ils sont jugés pour chantage, association de malfaiteurs et détournement de fonds publics avec d’autres acteurs de ce dossier scabreux.

Le maire, exclu des Républicains et qui encourt dix ans de prison ainsi qu’une peine d’inéligibilité, nie avoir commandité une vidéo compromettante pour « tenir » son ancien premier adjoint Gilles Artigues et avoir exercé un quelconque chantage sur lui.

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A la barre, son ancien directeur de cabinet fragilise cette position. Dès son élection au printemps 2014 : « Monsieur le maire m’a demandé une solution pour tenir en respect Gilles Artigues, parce que nous avions (…) un doute sur sa capacité à ne pas comploter », raconte Pierre Gauttieri.

Alors quand, peu après, l’adjoint à l’éducation, animé par ses propres motivations, suggère de piéger Gilles Artigues sur le plan des mœurs, « [il] en parle au maire pour savoir s’il souhaite qu[il] aille plus loin », poursuit son ancien bras droit. « Il [lui] dit de voir ce qu’il en est au juste. »

« Je m’en occupe »

L’ancien chef de cabinet Pierre Gauttieri arrive au tribunal de Lyon pour assister au procès dans l’affaire de chantage à la « sextape » à Saint-Etienne, le 22 septembre 2025.

Après plusieurs échanges avec l’ambitieux adjoint à l’éducation Samy Kéfi-Jérôme et son compagnon, Gilles Rossary-Lenglet, qui admet avoir conçu cette opération de « barbouzage », Pierre Gauttieri assure « reboucler » avec le maire. Il lui expose le plan : filmer Gilles Artigues à son insu avec un prostitué. En échange, le couple veut que la mairie soutienne Samy Kéfi-Jérôme aux législatives de 2017 et 40 000 euros.

« Monsieur le maire a pris la décision d’y aller » et sur le volet financier « il [lui] a dit [qu’il s’]en occup[ait] », assène l’ancien directeur de cabinet. La machine se met en marche et, début janvier 2015, Gilles Artigues est piégé dans une chambre d’hôtel parisien avec un escort-boy. En parallèle, deux associations touchent 20 000 euros chacune de subventions attribuées sur la réserve du maire. Les fonds sont reversés ensuite à Gilles Rossary-Lenglet.

Quand le scandale éclate, en août 2022, parce que ce dernier a tout révélé à Mediapart, Pierre Gauttieri se montre d’abord très loyal et couvre son employeur. Il accepte même d’être congédié sans faire de vague. « Je dois assumer le rôle de fusible. » En échange, il obtient une indemnité de départ et n’est pas licencié pour faute grave, ce qui lui permet de garder des allocations-chômage.

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« J’ai honte »

Quelques jours en détention en 2023 l’ont fait évoluer, dit-il et en décembre 2023, il change de pied. L’instruction a aussi fait émerger des enregistrements attestant de son implication, parfois brutale, dans le piège.

Lors d’un échange avec Gilles Artigues en 2018, que ce dernier a enregistré en catimini, Pierre Gauttieri lance : « J’ai une vidéo de vous le cul en l’air » et menace d’envoyer une copie aux « parents des élèves qui sont dans la même classe » que ses enfants.

L’enquête a aussi fait émerger son implication dans un autre complot, visant l’ancien maire de Saint-Etienne Michel Thiollière que Gaël Perdriau soupçonne aussi de manigances. Il s’agit de le filmer avec une prostituée mineure. Cette fois, le plan ne se concrétise pas.

Aujourd’hui, en instance de divorce et malade, Pierre Gauttieri reconnaît que ses actes sont « inexcusables ». « J’ai honte », dit-il, mais « [il] entend rester debout et essaye de retrouver un petit peu de dignité ». Interrogé sur la défense du maire qui l’accuse de mentir et d’avoir agi dans son dos, Pierre Gauttieri se dit « attristé ». « Ça me fait mal parce que je me suis battu des années à ses côtés en confiance », ajoute-t-il la voix tremblante, « même la machine de guerre a ses points faibles ».

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Le Monde avec AFP

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