Sur le portail Cheops, qui supporte la plupart des logiciels de la police nationale, le message en lettres rouges est apparu jeudi 13 février au matin : pour la énième fois, le logiciel de rédaction de procédure pénale « est actuellement indisponible » et « aucun délai de retour à la normale » n’est prévu. Comme un symbole, celui d’une gabegie sans équivalent dans l’histoire de la police, cette annonce a lieu alors que le projet d’un logiciel rénové, fiable et ergonomique, en chantier depuis 2016, est sur le point d’être abandonné, d’après nos informations. Le coût précis du fiasco est encore inconnu mais, selon une source policière, il pourrait atteindre « 16 à 20 millions d’euros ».
La rumeur enflait dans les couloirs du ministère de l’intérieur depuis dix jours. Elle a été confirmée à demi-mot par le directeur général de la police nationale en personne, Louis Laugier, au cours d’une réunion qui s’est déroulée Place Beauvau lundi. Prévu chaque année au mois de février, un point d’étape annuel n’a toujours pas été annoncé.
A la fin de 2021, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, promettait pourtant que l’outil, indispensable à des milliers de policiers au quotidien, serait prêt en 2024, après un temps de gestation de huit années déjà considérable et des millions d’euros engloutis en pure perte. Trois ans plus tard, la déconfiture est totale, huit ministres de l’intérieur et quatre directeurs généraux de la police nationale ont eu le temps de s’installer Place Beauvau pour tenter de faire aboutir un projet maudit, plombé par les chicayas entre services, les lourdeurs administratives, des erreurs stratégiques pourtant identifiées de longue date.
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