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Anthropologue et chercheuse au Centre de recherches internationales de Sciences Po, Pia Bailleul travaille entre autres sur l’enjeu des minerais au Groenland. Elle explique comment la question minière est liée à la construction de l’Etat groenlandais et au processus d’indépendance par rapport au Danemark.

Les déclarations de Donald Trump ont-elles créé un choc au Groenland ?

L’idée de racheter le Groenland n’est pas prise au sérieux par les Groenlandais. Ils l’ont vécu comme une marque de mépris, car M. Trump ne semble pas les considérer comme une nation capable de s’autodéterminer. Mais cet épisode a placé les Groenlandais sur la carte des besoins de la transition énergétique, ce qui n’est pas pour leur déplaire. Cela leur donne le sentiment d’être un pays riche, au centre du nouveau jeu géostratégique. Lors d’une conférence de presse, le premier ministre groenlandais, Mute Egede, a d’ailleurs clairement fait comprendre qu’il comptait tirer parti, sur la scène géopolitique, de l’intérêt de M. Trump pour les ressources naturelles du pays.

Les Groenlandais sont-ils tous favorables au développement de l’industrie minière ?

Il fait l’objet d’un très large consensus dans la population, car il peut être un moyen de résoudre les problèmes de pauvreté et de chômage, d’offrir des perspectives à la jeunesse. Mais aussi de préparer l’indépendance. L’intérêt des Américains pour les ressources naturelles est donc considéré comme de bon augure, à condition que les garde-fous légaux posés par le pays soient respectés.

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Quelque 250 sociétés d’exploration travaillent déjà au Groenland. Qu’attendent de plus les dirigeants du pays de la part des Américains ?

Ces sociétés ne font que de l’exploration : elles n’ont chacune qu’un bureau et quelques géologues. On ne compte en effet aujourd’hui qu’une seule mine en activité, celle qui exploite par intermittence de l’or à Nalunaq, et un seul projet sérieusement engagé, pour extraire, à Qaqortorsuaq, de l’anorthosite, utilisée pour l’isolation en laine de roche. Le Groenland est encore considéré comme une « zone frontière », comme on dit dans le jargon de l’industrie : un territoire très riche en minerais, mais qui n’est pas encore exploité. Les retombées économiques et fiscales de cette activité sont donc encore très peu élevées. Pour changer d’échelle, il faudra ouvrir des mines. Et, pour cela, attirer des capitaux étrangers. Il faut donc tisser des relations de confiance avec les pays d’où viendront les capitaux.

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