La consommation d’eau du robinet sera interdite dans les jours à venir dans 12 communes des Ardennes et quatre de la Meuse où des taux anormaux de PFAS, dits « polluants éternels », ont été relevés.
L’interdiction de boire l’eau et de l’utiliser pour préparer les biberons entrera en vigueur le 10 juillet dans les 12 localités des Ardennes, qui comptent au total 2 800 habitants, annonce par la préfecture du département dans un communiqué publié vendredi 4 juillet et cosigné par l’agence régionale de santé du Grand-Est. La même mesure s’appliquera dès samedi dans les quatre communes de la Meuse, qui totalisent 620 habitants, selon un communiqué de la préfecture publié jeudi soir. Aucune des deux préfectures ne précise la durée de cette interdiction.
Tous les villages concernés dans la Meuse sont situés sur le cours du Loison. Les communes touchées dans les Ardennes se situent, elles, dans le sud du département, à proximité de la Meuse ou de l’un de ses affluents.
Des taux de PFAS supérieurs à la limite légale de 100 nanogrammes par litre (ng/l) y ont été relevés dans l’eau distribuée. Une loi sur les polluants éternels promulguée au début de l’année prévoit notamment d’inclure les PFAS dans le contrôle sanitaire des eaux potables. La préfecture des Ardennes reconnaît que, dans les communes du département touchées, « la concentration totale des 20 principaux PFAS dépasse, de façon persistante et très importante, la limite réglementaire ».
« On va payer l’eau 100 fois plus cher »
Selon France 3 et Disclose, les taux dépassent de trois à 27 fois la limite dans 17 communes de la Meuse et des Ardennes. Avec 2 729 ng/l décelés en février, Villy, dans les Ardennes, détient le record national de contamination, précise Disclose. La source utilisée dans ce village est si polluée qu’on « ne peut pas la traiter, on ne peut pas rattraper le taux », regrette son maire, Richard Pilbiche.
Les PFAS, substances per- et polyfluoroalkylées, peuvent provoquer entre autres une augmentation du taux de cholestérol, des cancers, des problèmes de fertilité et de développement du fœtus. Massivement utilisés dans l’industrie depuis le milieu du XXᵉ siècle, par exemple pour fabriquer des poêles antiadhésives, des vêtements imperméables ou des cosmétiques, ils sont, comme leur surnom l’indique, extrêmement difficiles à éliminer une fois dans l’eau ou les sols.
En l’occurrence, « la pollution pourrait être liée à l’épandage, sur des parcelles agricoles situées à proximité des captages d’eau potable, de boues papetières susceptibles de contenir des PFAS », précise la préfecture de la Meuse, selon laquelle « cette origine reste à confirmer ». Richard Pilbiche reproche en outre à une papeterie des environs d’en avoir « enfoui des tas entiers » sur un terrain situé au-dessus de la source. La préfecture de la Meuse demande aux communes concernées et aux « personnes responsables de la production et de la distribution d’eau d’assurer la distribution de bouteilles aux habitants ». Pour Villy, cela représente une dépense de 18 000 euros sur un an. « On va payer l’eau 100 fois plus cher » que si elle était captée à la source, assure le maire.
Le préfet des Ardennes invite par ailleurs les communes concernées « à mettre en place, dans les meilleurs délais, un plan d’actions pour réduire de façon satisfaisante le taux de PFAS dans l’eau et rendre de nouveau l’eau conforme aux normes en vigueur ».
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« On sait que notre pollution date d’au moins vingt-cinq ans », affirme Annick Dufils, maire de Malandry, près de Villy, qui dénonce « un scandale sanitaire ». Elle s’attend à ce que les travaux durent plus d’un an et coûtent de 500 000 à 900 000 euros. « On va s’endetter sur des décennies », ajoute-t-elle, regrettant l’absence de soutien des pouvoirs publics.