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Kyiv, le 28 mai 2025,
Chères lectrices, chers lecteurs,
La dernière fois, je vous ai raconté que j’avais vécu l’une des pires attaques sur Kyiv [Kiev, en ukrainien] de toute ma vie. Mais qu’en savais-je ? Vendredi 23 mai, Dima [le compagnon de Sasha] et moi étions dans le salon, on venait de réussir à endormir notre petit Marian, qui est en train de vivre le premier drame de sa vie, la pousse des dents, quand la sirène a retenti. Coup d’œil sur Telegram, quelques drones sont dans la région. On poursuit notre dîner. C’est assez fréquent, notre défense antiaérienne les élimine vite, en général. Pas cette fois-ci. Dans la nuit de vendredi à samedi, nous avons subi neuf heures d’attaque : 250 drones et 14 missiles balistiques ont déferlé sur Kyiv et sa région. Des dizaines sont tombés sur la ville, les explosions se sont enchaînées jusqu’au matin.
Pour la première fois depuis le début de la guerre, nous avons fait un lit avec des draps et des couvertures dans l’entrée, j’ai gardé près de moi un sac avec nos documents importants (pièces d’identité, diplômes, certificats de naissance…) et des bouteilles d’eau. Et là, par terre, j’ai somnolé avec Marian dans mes bras tandis que Dima est resté éveillé pour suivre la situation et savoir combien de dizaines de drones avaient dépassé la frontière, quels types de missiles étaient lancés, quelles cibles étaient visées, de quels quartiers les appels au secours étaient passés… Je n’avais plus dormi tout habillée pour être prête à sortir à tout moment depuis mars 2022. Nous avons laissé la porte d’entrée ouverte, car on sait tous maintenant que, en cas de forte explosion, elle peut être déformée par le souffle et ne plus s’ouvrir. Des gens sont restés coincés chez eux pour cette raison. J’ai aussi bien relu la notice de l’extincteur que j’ai acheté il y a quelques mois.
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