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L’opératrice du SAMU qui avait raillé fin 2017 au téléphone Naomi Musenga, jeune femme de 22 ans morte peu après à l’hôpital, a été reconnue coupable de non-assistance à personne en danger et condamnée à douze mois de prison avec sursis, jeudi 4 juille,t par le tribunal correctionnel de Strasbourg.

Le tribunal est allé au-delà des réquisitions du parquet, qui avait demandé dix mois avec sursis. Corinne M., l’opératrice âgée de 60 ans, est également condamnée à verser 15 000 euros à la famille de Naomi Musenga, au titre des frais d’avocats. Elle a dix jours pour faire appel.

Il était reproché à Corinne M., définitivement suspendue du SAMU et actuellement sans emploi, de « ne pas avoir respecté les protocoles » de prise en charge « et les bonnes pratiques » du SAMU, selon le parquet.

Durant l’audience, l’ex-opératrice avait pris la parole en se tournant vers la famille de Naomi Musenga, sa mère, Honorine Musenga, et ses frère et sœur, Gloire et Louange : « Je souhaiterais m’excuser de tout ça. Je vous demande de m’excuser, c’était inqualifiable. »

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Un retard de prise en charge « de près de 2 h 20 »

Mère d’une enfant de dix-huit mois, Naomi Musenga est morte le 29 décembre 2017 à l’hôpital de Strasbourg après avoir été prise en charge avec « un retard global de près de 2 h 20 », selon un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Se plaignant d’importantes douleurs au ventre, elle avait pris contact avec les pompiers qui avaient transféré l’appel au SAMU. L’échange entre les deux opératrices se faisait déjà « sur un ton moqueur », avait relevé l’IGAS. « J’ai très mal au ventre », « Je vais mourir… », disait dans un souffle ensuite Naomi Musenga, peinant à s’exprimer. « Oui, vous allez mourir, certainement un jour comme tout le monde », rétorquait la régulatrice, employant « un ton dur, intimidant et déplacé face à des demandes d’aide réitérées », toujours selon l’IGAS. Avant de raccrocher.

Naomi Musenga avait fini par être dirigée vers SOS-Médecins et puis être hospitalisée, mais bien trop tard. L’échange avait fuité sur les réseaux sociaux et dans les médias quelques mois plus tard, déclenchant un tollé. « Sans cette bande sonore diffusée de très nombreuses fois, je ne suis pas certain que l’on aurait eu une date d’audience », a estimé Jean-Christophe Coubris, avocat de la famille de Naomi Musenga.

A l’issue de la conversation, l’opératrice n’avait pas transmis l’appel à un médecin régulateur, contrairement à ce qu’imposait la procédure en cas de douleurs abdominales, et n’avait posé « aucune question » pour renseigner « l’état clinique de la patiente », a pointé l’IGAS. Un des avocats de la prévenue, Olivier Grimaldi, avait déclaré en mai à l’Agence France-Presse qu’il contestait ces poursuites, regrettant que l’employeur ou les supérieurs de sa cliente n’aient pas été poursuivis.

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La longue instruction a été ponctuée d’expertises et de contre-expertises. Après la mort de Naomi Musenga, une première, dénoncée par sa famille, avait conclu à une mort consécutive à une « intoxication au paracétamol absorbé par automédication sur plusieurs jours ». Mais une autre expertise avait évoqué un accident vasculaire digestif ayant entraîné une hémorragie. L’enquête avait également été ouverte pour homicide involontaire. Mais les expertises n’ont pas relevé de « lien de causalité » entre le retard de prise en charge de la jeune femme et sa mort. Naomi Musenga se trouvait déjà « au-delà de toute ressource thérapeutique au moment du premier appel au SAMU », selon l’enquête.

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En juillet 2019, dix-huit mois après la mort de Naomi Musenga, avait été créé le diplôme d’assistant de régulation médicale, désormais obligatoire pour travailler dans les centres de régulation des appels des services d’aide médicale urgente.

Le Monde avec AFP

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