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Dans un décor de légende, le 7 juillet, le Français Anthony Turgis s’imposait lors de la 9e étape du Tour de France 2024. Sur les routes ou devant leur téléviseur, les suiveurs découvraient, ébahis, l’épreuve dite des « chemins blancs », composée de certaines portions graveleuses. Dimanche 6 octobre, Mathieu Van der Poel, sextuple champion du monde de cyclo-cross et champion du monde sur route en 2023, a imité le coureur de 30 ans, en remportant la troisième édition des Mondiaux de gravel, entre Hal et Louvain, en Belgique, au bout de 182 kilomètres d’effort.
Le vainqueur de Paris-Roubaix, en avril, a devancé les Belges Florian Vermeersch et Quinten Hermans. Il succède au Slovène Matej Mohoric, sacré en 2023 en Vénétie (Italie).
Pour conquérir ce titre planétaire dans une troisième discipline, Mathieu Van der Poel a été actif pendant une grande partie de la course, multipliant les attaques, vaines ou efficientes, sur un parcours exigeant (1 200 mètres de dénivelé positif). A travers le parc national des Forêts du Brabant, dans une région qu’il affectionne – il a remporté son troisième Tour des Flandres en mars –, le Néerlandais (29 ans), troisième en 2022, a fait parler son expérience et sa puissance pour dominer Florian Vermeersch, déjà médaillé d’argent en 2023.
« La course était très plaisante »
« C’était un grand objectif, j’ai pris beaucoup de plaisir dans cette nouvelle discipline, a expliqué le vainqueur au micro de l’Union cycliste internationale (UCI) après la course. Je suis très heureux. J’ai essayé de pousser tous mes concurrents à la limite. C’était très difficile, mais la course était très plaisante. »
Les deux coureurs, présents dans une échappée de sept, se sont envolés à 40 km de l’arrivée. Dans la dernière boucle autour de Louvain, Mathieu Van der Poel a porté l’estocade dans un faux plat montant, à 13 km de la ligne. Le petit-fils de Raymond Poulidor avait préparé son plan : « J’ai voulu durcir dans cette dernière côte, car je ne savais pas comment je réagirai à un sprint sur un vélo de gravel », a-t-il confié au micro de l’UCI.
A mi-chemin entre le vélo de route, le vélo tout-terrain (VTT), le cyclo-cross et le vélo tout chemin (VTC), le gravel est devenu une discipline à part entière. « C’est une nouvelle discipline qui attire de plus en plus de pratiquants », explique l’ancien coureur de cyclo-cross Anthony Colas, qui a aussi pris goût au gravel. Convaincue de son succès, l’UCI a créé des championnats du monde destinés à ses spécialistes, en 2022.
« Le gravel, c’est le padel du vélo »
La Française Pauline Ferrand-Prévot avait décroché le premier titre de l’histoire en Vénétie. Samedi, la Néerlandaise Marianne Vos, octuple championne du monde en cyclo-cross, triple championne du monde sur route, double championne du monde sur piste, a devancé au sprint Lotte Kopecky. A l’image de Mathieu Van der Poel, un coureur de gravel est « complet, explosif et endurant », souligne Steve Chainel, ex-spécialiste du cyclo-cross et consultant sur Eurosport.
Proche en certains points du cyclo-cross, le gravel, né aux Etats-Unis il y a une quinzaine d’années (la course la plus connue est Barry-Roubaix, dans le Michigan), mélange des passages sur route, des pavés, en gravier et des chemins de terre. « Beaucoup continuent d’associer le gravel au VTT, ce qui bloque son développement. Les parcours de gravel sont généralement plus longs et moins pentus. »
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Vélo hybride, polyvalent et plus confortable qu’un VTT, le gravel, plus robuste qu’un vélo de route avec des pneus plus larges et crantés, a aussi contribué au succès du bikepacking et au développement de la culture du long voyage cycliste. « Le gravel, c’est avant tout un état d’esprit, résume Steve Chainel. C’est aussi bien du bikepacking qu’une sortie entre potes sur 40 km. Le gravel, c’est le padel du vélo. »
Le gravel suscite l’intérêt et attire des grands noms. Outre Mathieu Van der Poel, le tenant du titre Matej Mohoric, le champion d’Europe sur route Tim Merlier, ou encore l’ancien coureur professionnel Philippe Gilbert, le pilote de formule 1 Valtteri Bottas, passionné de vélo, était engagé dans la catégorie des 35-39 ans, en marge des « élites », lors de ces Mondiaux. « Ce qui est magique avec le gravel, c’est qu’un bon coureur peut se retrouver sur une même course qu’un champion de l’envergure de Mathieu Van der Poel », se réjouit Anthony Colas.
Les Mondiaux 2025 à Nice
Vainqueur d’un huitième titre mondial toutes disciplines confondues, Mathieu Van der Poel a célébré son succès sur la ligne d’arrivée en soulevant sa machine. Cette marque de vélos allemande et le coureur néerlandais ont annoncé, en mars, la signature d’un contrat portant sur les dix prochaines saisons.
« Il y a toute une économie qui pousse derrière le gravel, explique Steve Chainel. Toutes les marques de cycles n’ont pas d’autre choix que de développer les vélos de gravel. Le marché est porteur. On n’achète plus un 4 × 4, mais un SUV, plus maniable. Le gravel, c’est un peu ça. » Si la discipline connaît un engouement certain aux Etats-Unis ou en Espagne, la France accuse un léger retard, concèdent toutefois Steve Chainel comme Anthony Colas.
Ce dernier espère que l’organisation des prochains Mondiaux de gravel, dans l’Hexagone, à Nice, en 2025, permettra d’inverser la tendance. Le futur retraité Romain Bardet, vainqueur de la première étape de la Grande Boucle 2024 et deuxième du Tour de France 2016, a déjà annoncé son intention de se tourner vers le gravel après avoir pris sa retraite sur route, programmée pour juin 2025.
