Chaque fin de mois, la guerre s’invite dans sa boîte aux lettres. Piotr, étudiant en informatique à Oufa, grande ville à l’ouest de l’Oural, suit de loin l’« opération militaire spéciale » lancée par le Kremlin contre l’Ukraine, le 24 février 2022. La vingtaine dynamique, le jeune homme parle avant tout de ses projets de start-up dans les systèmes informatiques. Mais, à demi-mot, il raconte aussi comment « cette guerre qui n’est pas la nôtre accompagne notre quotidien ».
A l’automne 2022, comme tant d’autres jeunes de son campus, il a craint que la mobilisation le happe et l’envoie au front. Son statut d’étudiant et d’expert en informatique lui vaut, depuis, d’être exempté. « En revanche, le recrutement de volontaires n’a cessé de s’intensifier. Je le vois dans mon courrier », ironise Piotr. Dans sa boîte aux lettres : la facture d’électricité mensuelle. Au verso : la reproduction de l’affiche, collée un peu partout en ville, qui détaille les sommes offertes à tout volontaire pour « rejoindre l’armée de la victoire », comme le promet le slogan officiel.
A grand renfort de publicité, le ministère de la défense organise, avec les administrations régionales de tout le pays, ce recrutement local d’hommes prêts à partir combattre. Une mobilisation cachée, pour attirer des volontaires sans provoquer la panique de la mobilisation officielle de l’automne 2022. C’est une nécessité, alors que le conflit s’éternise et que le front s’élargit, depuis la Crimée jusqu’à Koursk, région russe partiellement occupée par l’armée ukrainienne depuis l’été 2024.
Il vous reste 79.79% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.