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Histoires Web mardi, juillet 2
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Installée au Brésil, l’Hispano-Belge Cristina de Middel vit depuis plus de dix ans en Amérique latine. Et elle apprécie l’inconfort d’une vie menée loin de ses repères. « Ça force à s’adapter, à ne pas prendre les choses comme allant de soi », souligne cette photographe chaleureuse, qui s’exprime, au téléphone, dans un français fluide, piqueté de quelques anglicismes depuis sa cuisine de Salvador de Bahia. Le déracinement est une seconde nature : née à Alicante, en Espagne, elle a grandi en partie en France, au rythme des mutations de son père, qui travaillait dans le textile.

Aux Rencontres d’Arles (Bouches-du-Rhône), c’est à une migration bien plus difficile et tragique que la sienne qu’elle s’attache : dans la belle église des Frères-Prêcheurs, elle présente « Voyage au centre », qui suit la traversée du Mexique de migrants espérant rejoindre les Etats-Unis. Un sujet rebattu, mais que la photographe aborde à sa façon singulière : elle s’est fait un nom en mêlant documentaire et fiction, depuis son livre The Afronauts (autoédition, 2012), son best-seller constamment republié. « La guerre, la migration, la prostitution ont été racontées de nombreuses fois… J’ai toujours cherché des façons d’impliquer davantage le public. »

L’exposition et le livre, publié en même temps aux éditions Textuel, font de la migration un récit mythologique avec des héros, des épreuves, des bonnes fées, des monstres… « Les médias présentent les migrants comme des victimes ou des menaces, dit-elle. Pour moi, ces gens devraient forcer l’admiration ! Ils risquent leur vie dans ce voyage pour aider leur famille et aller dans un endroit où on ne veut pas d’eux. J’ai voulu en faire une aventure. » Rien de tel que le Mexique pour poser le décor de cette odyssée pleine de dangers. Non seulement c’est la porte d’entrée pour les Etats-Unis, mais c’est un pays exubérant où, selon elle, « le rêve et le réel sont très difficiles à distinguer. Il y a un mélange de magie et de violence, toute une dimension imaginaire ».

Deux de ses images sont d’ailleurs des hommages à Graciela Iturbide, grande figure de la photographie mexicaine connue pour ses clichés oniriques et énigmatiques, devenue son amie. L’une montre un homme qui porte un tégu, cet énorme lézard, comme un collier. Un clin d’œil à Notre-Dame des iguanes (1979), l’icône de l’artiste mexicaine. Sauf que l’image d’origine montrait une femme au marché coiffée de reptiles, quand Cristina de Middel témoigne de la fascination des cartels de la drogue pour les animaux exotiques.

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