Il ne faut pas craindre d’appeler un chat un chat, ni un fasciste un fasciste. L’armée dans les rues de Los Angeles, le sénateur démocrate Alex Padilla brutalisé et menotté, jeudi 12 juin, par des agents fédéraux, pour avoir interpellé un membre de l’administration Trump : ces jours-ci, l’actualité fait avancer le débat sur la manière la plus juste de qualifier le 47e président des Etats-Unis et son entourage.
Mais la vraie question, en réalité, est plutôt de saisir l’idéologie sous-jacente, au service de laquelle se déploie l’extrême droite américaine. S’agit-il plutôt d’un nationalisme teinté de fondamentalisme religieux ? D’un suprémacisme ethnique ? D’un techno-féodalisme ? D’une idéologie libertarienne vouée au remplacement de l’Etat par le seul marché ?
On l’a déjà dit, ce qui réunit toutes ces composantes, parfois antagonistes, de la contre-révolution trumpienne est un anti-environnementalisme viscéral, fondé sur la négation des effets des activités économiques sur le climat et le vivant. Dans un texte publié en avril par le Guardian, Naomi Klein et Astra Taylor proposent d’aller plus loin.
Les deux essayistes parlent d’un « fascisme de la fin des temps », une sorte d’eschatologie qui prospère sur l’idée que, sous l’effet de la dérive climatique, de l’effondrement des écosystèmes et des troubles qui ne manqueront pas d’en résulter, la fin du monde tel que nous le connaissons est inéluctable. Si inéluctable qu’il est vain de tenter d’éviter cette issue : il faut s’y préparer et en hâter la survenue. Pour – enfin ! – passer à autre chose.
« Survivalisme monstrueux »
« Le fascisme de la fin des temps est un fatalisme sombre et festif, écrivent les deux autrices, l’ultime refuge de ceux qui trouvent plus facile de célébrer la destruction du monde plutôt que d’imaginer vivre privés de leur suprématie. » L’extrême droite américaine est imprégnée d’un millénarisme apocalyptique, nourri par la crise environnementale et trahi par un sécessionnisme radical, exposent Naomi Klein et Astra Taylor. Les projets de cités-Etats pour milliardaires, ou la multiplication des immenses bunkers de luxe ultra-sécurisés (un business en plein essor, selon le Wall Street Journal), conçus pour permettre à leurs occupants de continuer à vivre confortablement dans un monde en proie au chaos, en sont les signes saillants.
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