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Histoires Web mercredi, octobre 23
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Au rez-de-chaussée d’un immeuble au bord de la route qui traverse Debbabiyé, un village en surplomb du Nahr El-Kébir, un fleuve qui sépare le Liban de la Syrie, des hommes se recueillent autour de l’imam sunnite et de la famille Sabha, lundi 21 octobre. Dans la maison qui leur fait face, au premier étage, les femmes prient ensemble, les yeux rougis, en mémoire de Tarek Sabha. L’adjudant-chef au sein de l’armée libanaise a été tué la veille, à 38 ans, avec deux autres soldats, dans une frappe israélienne près de la ligne de démarcation entre Israël et le Liban.

Vue des confins septentrionaux du pays, la guerre qui fait rage dans les villages frontaliers du Sud, entre l’Etat hébreu et le Hezbollah, paraît lointaine. Elle s’insinue pourtant dans chaque foyer de la région de l’Akkar, où l’armée offre une échappatoire à la pauvreté.

Tarek Sabha, soldat libanais, 38 ans, originaire de Debbabiyé, dans la région du Akkar, au nord du Liban, tué en opération.

« Leur véhicule, militaire, était bien identifié. Le drone l’a ciblé au niveau du siège conducteur où se trouvait Tarek. L’arrière du véhicule est intact. Israël s’est excusé de les avoir tués, disant que c’était une erreur, mais ce n’est pas vrai, c’était volontaire », accuse Taleb Sabha, l’oncle du militaire tué. « Tout le monde est choqué. C’est le deuxième militaire de la famille Sabha tué en service. Le premier, mon neveu, est tombé en 2016, face au terrorisme djihadiste. Tarek, lui, est tombé face au terrorisme de l’Etat d’Israël », poursuit l’enseignant en biochimie de 52 ans.

Manque de moyens

Depuis qu’Israël a lancé, fin septembre, des opérations terrestres dans le sud du Liban, appuyées par une campagne de frappes intensives, jusque dans la plaine de la Bekaa et dans la banlieue sud de Beyrouth, au moins huit soldats des Forces armées du Liban (FAL) ont été tués. Repliés dans leurs bases au sud du pays, 4 000 militaires libanais sont les observateurs impuissants d’une guerre que leur gouvernement n’a pas choisie, condamnés à l’inaction par le manque de moyens et d’équipements face à deux forces plus puissantes qu’eux.

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« J’ai perdu mon fils et le gouvernement libanais n’a rien dit. Il a seulement dit pardon. Je suis fière car mon fils était en train de protéger son pays, c’était son devoir, mais, en même temps, je suis triste car nous l’avons perdu à cause de cette guerre », se lamente sa mère, Rihab Al-Akari, enveloppée dans un voile noir. « C’est l’armée libanaise qui doit protéger la frontière, pas le Hezbollah, mais il n’y a pas de gouvernement », soupire Zarminé Sakayan, la belle-mère du soldat.

Réfugiée dans la cuisine, sa jeune épouse de 25 ans se mure dans le chagrin. Ils ont eu trois enfants, âgés de 2 à 8 ans. Chaque matin, jusqu’au dernier avant sa mort, Sarah Sabha l’appelait au téléphone, angoissée de le savoir posté à Aïn Ebel, un village chrétien à la frontière avec Israël, évacué durant la guerre. Il était déployé au sud du Liban depuis dix ans. En juillet, il avait achevé dix-huit ans de service mais il avait décidé de rester au sein de l’armée. « Il n’a même pas demandé à être posté ailleurs. Il aimait sa mission là-bas et il n’avait jamais peur. Nous, oui », dit la veuve, coiffée d’un voile blanc.

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