YouPorn, Pornhub et RedTube sont de nouveau accessibles en France. Leur propriétaire, le groupe Aylo, leader de l’industrie pornographique en ligne, en a fait l’annonce vendredi 20 juin, à la suite d’une décision de justice favorable aux acteurs du secteur. Ces trois sites, qui comptent parmi les portails pornographiques les plus visités (Pornhub revendique 7 millions de visites quotidiennes dans l’Hexagone), étaient fermés depuis deux semaines sur le territoire français. Aylo entendait ainsi protester contre l’obligation lui étant faite de vérifier l’âge de leurs visiteurs.
Ce blocage auto-imposé était entré en vigueur le 4 juin, quelques jours avant une date butoir permettant à l’Arcom de sanctionner et de bloquer un certain nombre de sites domiciliés dans l’Union européenne (UE) et ne se conformant pas à la loi – parmi lesquels Pornhub, YouPorn et RedTube (établis à Chypre). Sauf que, coup de théâtre, le tribunal administratif de Paris a suspendu ce dispositif, par une décision rendue lundi.
Bras de fer européen
Pour bien comprendre, il faut savoir que, compte tenu de la loi française, l’Arcom ne peut agir aujourd’hui que contre les sites pornographiques établis en France ou hors de l’UE. Si elle souhaite sanctionner des sites domiciliés dans un pays européen, elle doit passer par une procédure prenant plusieurs mois et la notifier aussi bien à la Commission européenne qu’aux Etats membres concernés, afin d’être en conformité avec le droit européen.
C’est ce qu’a fait la France en publiant en février un arrêté listant 17 sites pornographiques gérés à partir de pays comme Chypre, le Portugal, ou encore la Hongrie, contre lesquels elle souhaitait prendre des mesures de blocage. Or, c’est justement cet arrêté, attaqué en justice par le site Xhamster, qui a été suspendu en début de semaine, dans une décision surprise arguant que le texte ne respectait toujours pas le droit européen. Le gouvernement français a manifesté son intention de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’Etat pour contester cette décision.
La suspension de cet arrêté est un sérieux revers pour l’Arcom. Elle perd ainsi, pour l’heure, tout moyen d’action contre les nombreux sites domiciliés à Chypre et dans d’autres pays de l’UE. C’est aussi une déconvenue pour le gouvernement français, qui a engagé un bras de fer avec les leaders de la pornographie en ligne il y a cinq ans et fait voter deux textes de loi successifs à cette fin : la loi de lutte contre les violences conjugales, en 2020, et la loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique, en 2024.
Bataille autour du contrôle de l’âge
En rouvrant Pornhub, RedTube et YouPorn, Aylo s’est fendu d’un nouveau message saluant la décision du tribunal, et réitérant son refus de mettre en place des outils pour vérifier que les personnes consommant de la pornographie sont bien majeures. Le groupe argue depuis toujours que cette vérification doit se faire au niveau du téléphone ou de l’ordinateur, renvoyant la balle à Apple, Google et Microsoft.
De son côté, la France mène également la bataille au niveau de l’UE, pour parvenir à ce que des textes européens imposent sur l’ensemble du territoire de l’union une vérification d’âge pour protéger les mineurs en ligne et les empêcher d’accéder à des contenus pornographiques. La Commission européenne a récemment ouvert une enquête visant plusieurs sites… dont Pornhub.
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