Un moment, la flamme a vacillé. Les pluies continuelles qui se sont abattues sur les vignes des mois durant allaient-elles doucher les espoirs de mettre en cuve le premier millésime estampillé bio des vins des Hospices de Beaune (Côte-d’Or) ? Et ainsi éteindre le feu d’une démarche de conversion vers une culture de la vigne respectueuse de l’environnement, entreprise depuis 2017 ?
La pression était forte sur les épaules pourtant solides de Ludivine Griveau, régisseuse de ce prestigieux domaine viticole bourguignon. « Avant la fleur, au moment où l’on pouvait encore sauver de la récolte, je suis allée voir le directeur des Hospices pour lui demander si on continuait ou pas cette dernière étape vers la conversion en bio. Il a dit qu’il fallait poursuivre », raconte-t-elle. Et elle ajoute : « C’est un luxe de pouvoir mener la culture en laquelle je croyais, en faisant fi de la perte de récolte probable. »
L’évaporation de la vendange a pu être estimée lorsque l’entreprise Sotheby’s a dévoilé, dans ses locaux parisiens, le nombre de pièces qui seront mises aux enchères, dimanche 17 novembre, à Beaune. Pour la 164e édition de cette vente de charité, également baromètre du marché des vins de Bourgogne scruté de près par les professionnels, 438 pièces et trois feuillettes passeront sous le marteau du commissaire-priseur (une pièce ou fût contient 228 litres et une feuillette correspond à un demi-fût), à comparer aux 802 pièces soumises à adjudication en 2023. Quant à la pièce de charité, dite « pièce des présidents », clou des enchères, dont le produit de cession est destiné à deux associations caritatives, elle contiendra du beaune premier cru « Les Bressandes ». « Le coup de cœur » de la régisseuse, « passé cette année devant certains grands crus », selon ses dires.
Ludivine Griveau, qui se dit fière d’avoir mené au bout la certification bio du domaine de 60 hectares, qualifie le millésime 2024 d’« expérimental ». Dès octobre 2023, la pluie est entrée en scène. « Au début, on s’est dit : “Il va s’arrêter de pleuvoir. Le temps va s’améliorer.” En fait, la pluie ne s’est jamais interrompue », témoigne-t-elle. De quoi ralentir les travaux dans les vignes, que ce soient les plantations ou la fertilisation des sols.
Toutefois, en avril, un épisode ensoleillé laisse croire à une récolte généreuse. Décision est même prise d’ôter quelques bourgeons pour ne pas surcharger la vigne. Mais l’espoir a vite été déçu par une suite du feuilleton météo sous le signe du yoyo. Des épisodes de froid ont succédé à des épisodes tropicaux. Au point que la vigne, concentrée sur sa survie, a privilégié la croissance des vrilles au détriment des fruits. Sans oublier que l’humidité ambiante et la rosée ont favorisé le développement du mildiou. Cette maladie provoquée par un champignon, bête noire des vignerons, a fait son apparition très précocement, dès fin avril. Elle ne lâchera, ensuite, jamais la pression, attaquant encore férocement en juillet. L’oïdium est aussi venu gâcher la fête.
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