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Histoires Web dimanche, avril 28
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L’avalanche de films sur l’école a quelque chose d’intrigant. Ce n’est pas nouveau, le cinéma s’invitant depuis des lustres dans la salle de classe pour humer la société. Il est des films de profs comme il est des films de flics et souvent le public suit, le spectateur réveillant l’écolier en lui. Ce sont les sujets actuels qui surprennent : moins de comédies potaches, plus de thrillers douloureux. Autrement dit, l’école au cinéma accompagne une forme de désillusion des enseignants.

Cette semaine sont sortis sur les écrans Pas de vagues et L’Affaire Abel Trem. Ils rejoignent à l’affiche Comme un fils, la comédie Bis repetita, La Salle des profs ou L’Innocence. Le 17 avril sortira Amal. Un esprit libre, sur le salafisme à l’école. On pourrait ajouter une bonne dizaine de films depuis un an, issus de plusieurs continents, tant la thématique éducative se joue des frontières.

Ces films montrent souvent comment un mot de travers de l’enseignant ou son désir de bien faire tournent au désastre, d’abord pour lui, pris dans un engrenage de rumeurs et de violences verbales, de fausses accusations et de menaces, dont les ressorts ont moins à voir avec les règles académiques qu’avec la religion, la politique, le prisme identitaire ou la sexualité.

Philippe Roth a anticipé dès 2000 dans La Tache un climat que l’on qualifiera de tribal. Le romancier américain raconte comment un professeur de lettres, à propos de l’absence récurrente de deux étudiants, descend aux enfers après avoir demandé à sa classe : « Ils existent vraiment ou bien ce sont des zombies ? »

Les incidents se multiplient

Les films d’aujourd’hui n’anticipent pas une société clivée, ils baignent dedans. Les enseignants Samuel Paty et Dominique Bernard ont été assassinés. Le proviseur du lycée Maurice-Ravel, dans le 20arrondissement de Paris, vient de partir en retraite anticipée après avoir reçu des menaces de mort – il avait demandé à trois élèves de retirer leur voile.

Teddy Lussi-Modeste, le cinéaste de Pas de vagues, également enseignant, a confié qu’un de ses collègues, après avoir confisqué un téléphone portable en classe, a été menacé de mort par un parent d’élève (dans L’Humanité, le 26 mars). Les incidents se multiplient, un peu partout, qui heurtent la laïcité ou le contenu des cours. En conséquence, les films d’école ont changé de registre.

« En quelques années, on est passé de films qui offraient une vision pédagogique et idéaliste à d’autres qui montrent une réalité traumatique », dit Jean-Pierre Obin, ancien inspecteur général de l’éducation nationale, auteur de Comment on a laissé l’islam pénétrer l’école (Hermann, 2020) et de Les profs ont peur (L’Observatoire, 2023).

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