La France va-t-elle rehausser les barrières à l’entrée des investisseurs chinois sur le marché hexagonal et s’opposer ainsi à la stratégie de Pékin pour exporter les surcapacités de son industrie ? Telle est la question à laquelle Bercy doit répondre face au rachat du groupe allemand de distribution Ceconomy – deuxième actionnaire de Fnac Darty –, annoncé fin juillet par JD.com, géant chinois du commerce en ligne de produits informatiques, électroniques et électroménagers.
Tout n’était pas bloqué le 10 septembre en France. Dans la soirée de cette journée de mouvement social, Bercy a envoyé une notification exigeant de JD.com qu’il fournisse des « renseignements » sur sa « stratégie ».
Tensions géopolitiques obligent, le sort du distributeur préféré des Français préoccupe le ministère de l’économie, des finances… et de la souveraineté industrielle et numérique. Dans son dernier rapport sur le contrôle des investissements étrangers en France, publié le 30 juillet, le Trésor justifie sa vigilance accrue par l’impératif de protéger les « intérêts nationaux » et de développer les « secteurs stratégiques ». Mais en quoi la distribution de réfrigérateurs, d’ordinateurs ou de télévisions serait-elle « stratégique » pour la souveraineté économique française ?
Stratégie de « navigation à l’étranger »
De fait, les entreprises de la Chine communiste, privées comme publiques, aussi prospères soient-elles, doivent suivre les directives de l’Etat-parti. Dans Le Quotidien du peuple du 1er décembre 2017, Richard Liu Qiangdong, fondateur et PDG de JD.com, déclarait que le président Xi Jinping, dans son discours prononcé devant le 19e congrès du Parti communiste chinois (PCC), avait « indiqué la voie pour JD.com » et se flattait, quelques jours plus tard, dans le quotidien Guangming, que son groupe comptât 162 cellules et 12 000 membres du PCC.
Confronté aux surcapacités industrielles, à la faible demande intérieure et à la déflation post-Covid-19, Pékin fait feu de tout bois pour maintenir les exportations. Le plan d’expansion de JD.com sur le Vieux Continent s’inscrit dans la ligne du PCC dite de « navigation à l’étranger » : quitter l’« océan rouge » – le marché domestique, ravagé par une sanglante guerre des prix – pour l’« océan bleu » – le marché étranger, dont la maturité économique offre une marge attrayante.
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