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Histoires Web lundi, octobre 21
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Le 3 juillet 1940, puis le 6 juillet, à Mers El-Kébir, en Algérie, la marine britannique détruisait une partie de la flotte française, causant la mort de 1 295 marins. Même si elle prête toujours à controverse, la raison en est connue : les Britanniques craignaient que les Allemands mettent à leur service les navires français stationnés sur place, après la convention d’armistice conclue entre Pétain et Hitler et entrée en vigueur le 25 juin.

Un ancien de la marine nationale, devenu chercheur des mers, Max Guérout, vient d’apporter ce qui semble être un élément inédit au récit de cet épisode : les services d’espionnage anglais avaient récupéré quelques jours auparavant les codes secrets de la marine française et les avaient cassés, ce qui leur permit de deviner et de contrecarrer les desseins français.

Dans un ultimatum lancé le 3 juillet au matin, les Britanniques exigeaient soit que les navires français poursuivent le combat auprès du Royaume-Uni, soit qu’ils soient désarmés, soit qu’ils soient transférés dans un port britannique ou en Martinique. Les négociations durèrent toute la journée. Elles furent l’objet d’allers-retours incessants entre l’amiral Marcel Gensoul, qui commandait l’escadre de Mers El-Kébir, et l’état-major de la marine en métropole, alors aux ordres de l’amiral François Darlan (future figure du régime de Vichy). Décoder les échanges secrets des Français offrait aux Britanniques de connaître, en direct ou presque, leurs coups de bluff aussi bien que leurs intentions réelles.

Un acteur involontaire

Celui qui émet cette hypothèse, Max Guérout, 88 ans, est à la fois un vieux loup de mer et un rat de bibliothèque. Ayant fini sa carrière ­militaire avec le grade de capitaine de frégate, il s’est reconverti en 1988 dans l’archéologie sous-marine. Il a exploré de nombreuses épaves et tout autant de fonds d’archives dans les services historiques. C’est cette expérience qu’il relate dans un livre paru récemment (Plongées mémoire, Le Chameau malin).

Un chapitre est consacré au Narval, un sous-marin qui, en 1940, fut l’un des premiers – et l’un des rares – bâtiments français à se rallier au général de Gaulle, juste après l’appel du 18 juin. Selon l’hypothèse de l’auteur, s’appuyant sur des archives françaises mais aussi britanniques, son commandant, François Drogou, héros de la France libre, fut un acteur bien involontaire de la désastreuse journée du 3 juillet.

Explication. En 1940, le Narval est basé à Sousse, en Tunisie. Bien décidé à rejoindre ceux qui veulent poursuivre le combat contre l’Allemagne, François Drogou le fait appareiller secrètement le 24 juin au soir. Le sous-marin arrive le 26 au matin à Malte, île alors sous domination britannique. Le 28 juin, six jours donc avant Mers El-Kébir, les hommes de la Naval Intelligence Division (NID), le service d’espionnage de l’amirauté britannique, récupèrent à bord les codes secrets de la marine française. Les précieux documents sont transférés en Angleterre, à Bletchley Park plus exactement, là même où l’équipe d’Alan Turing parviendra à percer le chiffrement des messages allemands envoyés par l’encodeuse Enigma.

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