Le retour du président de la République sur le devant de la scène intérieure est à la fois compréhensible et ambigu. Compréhensible parce que le décalage entre l’accélération des bouleversements dans le monde et la quasi-paralysie de la vie politique française a de quoi rendre perplexe. Si le pays ne muscle pas rapidement sa défense ainsi que son appareil de production, et s’il ne réinterroge pas le concept de citoyenneté à l’heure de l’essor des régimes autoritaires, il se met en grand danger. Fortement impliqué dans la riposte européenne aux foucades de Donald Trump, face au risque de désengagement militaire américain du continent européen et à la menace russe, le président français a toute légitimité pour jouer les éclaireurs.
Mais ce retour, concrétisé par une longue intervention télévisée, mardi 13 mai sur TF1, est en même temps ambigu. Le principal défi auquel est confronté le pays pour regagner en souveraineté est de parvenir à réduire le poids des remboursements de sa dette publique, dont le montant croissant obère ses marges de manœuvre. Or, il n’est pas certain que, sur ce chapitre, le chef de l’Etat soit dans la disposition d’esprit ou capable de voler au secours de son premier ministre.
Le récent différend apparu entre les deux têtes de l’exécutif à propos de l’usage du référendum éclaire l’impasse dans laquelle risque de se trouver François Bayrou lorsqu’il présentera, à l’été, son plan de redressement des finances publiques. A l’Assemblée nationale, son sort dépend étroitement du comportement du groupe socialiste, qui l’a sauvé à deux reprises en refusant de voter la motion de censure déposée par La France insoumise contre les projets de budget pour 2025 et de loi de financement de la Sécurité sociale.
Seule la neutralité durable de ce groupe peut lui garantir, à l’avenir, d’échapper à la coalition des oppositions (gauche, extrême droite) qui avait eu raison du gouvernement Barnier. Celle-ci est loin de lui être acquise pour trois raisons : quel que soit le résultat de son congrès en juin, le Parti socialiste continuera de se situer dans l’opposition ; le montant de l’effort à fournir – soit 40 milliards d’euros à trouver en 2026, près de 100 milliards d’euros d’ici à 2029 – pour simplement stopper la progression de la dette est si important qu’il oblige à réinterroger les politiques publiques et le modèle social alors qu’il n’existe aucun consensus sur le nouveau modèle à construire.
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