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C’est dans un contexte tendu que trois représentants des trois principaux blocs politiques se sont affrontés, mardi 25 juin, lors d’un débat sur TF1 : Gabriel Attal, premier ministre et représentant du camp présidentiel, Jordan Bardella, président du Rassemblement national, et Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise et représentant du Nouveau Front populaire.

En introduction, Manuel Bompard, montrant une photo de Pôle emploi, a dit refuser « une France dans laquelle des personnes âgées sont obligées de retourner à Pôle emploi pour pouvoir vivre dignement » et a réaffirmé son souhait de remettre en cause la réforme des retraites. Jordan Bardella, lui, a choisi de diffuser une photo de facture d’électricité, s’est posé en en potentiel « premier ministre du pouvoir d’achat », tandis que Gabriel Attal a choisi d’évoquer l’école, « la mère des batailles » « il faut combattre les inégalités » dans « le respect des professeurs [et avec] la lutte contre le harcèlement ».

Pouvoir d’achat

Interrogé sur le fait qu’il ne propose plus en priorité la baisse de la TVA sur les produits de première nécessité, mais seulement celle de l’énergie la passant de 20 % à 5,5 %, Jordan Bardella a expliqué ce choix par « la situation budgétaire aujourd’hui de quasi-faillite ». « Je souhaite revenir à la raison budgétaire. Et cet état d’esprit avec lequel je souhaite aborder les questions économiques m’amène à faire des priorités », a-t-il expliqué.

Dans la foulée, Manuel Bompard a défendu la proposition du Nouveau Front populaire de bloquer les prix de produits de première nécessité. Pour l’« insoumis », la différence avec la baisse de la TVA réside dans le fait que, selon lui, « ce n’est pas au budget de l’Etat de venir alimenter des profits gigantesques qui ont été réalisés ces dernières années par les industriels de l’agroalimentaire, par les énergéticiens ». M. Bompard a appelé à ce que ce blocage des prix, sur le modèle de celui appliqué à La Réunion sur 150 produits, soit « appliqué immédiatement dès le mois de juillet pour que les Français retrouvent de l’oxygène ». Il a également rappelé sa volonté d’augmenter le smic à 1 600 euros net.

Gabriel Attal, lui, a assuré qu’à la différence de ses concurrents, il était « premier ministre et [n’avait] pas envie de faire croire à la Lune ». Il a promis un « paquet pouvoir d’achat dès cet été », avec deux axes, « gagner plus et dépenser moins », en revalorisant les retraites sur l’inflation, « libérer les augmentations de salaire » et en baissant les factures d’électricité de 15 % « dès l’hiver prochain ». « Tout cela est financé, sérieux et crédible », a-t-il ajouté.

Réforme des retraites

Gabriel Attal a été net : « Non », il n’abrogera pas la réforme des retraites mais a assuré vouloir « agir sur l’emploi des seniors », notamment en permettant à « un senior au chômage qui reprend un emploi moins bien rémunéré que l’emploi qu’il avait avant d’être au chômage, puisse cumuler son nouveau salaire avec son allocation chômage pour que ça lui fasse le même salaire qu’avant ».

Jordan Bardella, lui, a dit souhaiter que « dès l’automne », les personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans puissent « partir avec un temps de cotisation de 40 annuités et un âge de départ légal de critères français liés au modèle français de 60 ans ». Pour les autres, l’âge de départ serait de 62 ans et 42 annuités. « Par exemple, quelqu’un qui a commencé à travailler à 24 ans partira après quarante-deux années de cotisations, c’est-à-dire 66 ans », a-t-il expliqué.

Manuel Bompard a rappelé le souhait du Nouveau Front populaire de revenir sur la réforme et de « ramener l’âge de départ à la retraite à 62 ans et ensuite, avant 2027, déposer une proposition de loi pour ramener l’âge de départ à la retraite à 60 ans » et quarante annuités de cotisation. Il souhaite également « passer la retraite minimum au niveau du smic pour une carrière complète ». Aux yeux de M. Attal, une telle réforme reviendrait à diminuer le volume des pensions distribuées, du fait de la hausse du nombre de retraités. « Faux », répond M. Bompard, « vous êtes fâché avec les chiffres, M. Attal ».

Les impôts

Rappelant la suppression de la taxe d’habitation et la suppression de la redevance audiovisuelle, Gabriel Attal assure avoir une « règle d’or : pas d’augmentation d’impôts pour les Français ». Pour Manuel Bompard, « 92 % des Français, c’est-à-dire tous ceux qui gagnent moins de 4 000 euros net par mois, paieront moins ou autant d’impôts qu’aujourd’hui ; et oui, il y aura davantage d’impôts pour les 8 % et en particulier pour les 1 % les plus riches et en particulier pour les 0,1 % les plus riches qui paient moins d’impôts, proportionnellement, que les classes moyennes ». Jordan Bardella a assuré ne pas vouloir augmenter les impôts mais n’a pas précisé comment il finançait ses mesures, répétant son souhait d’un « audit sur les comptes de l’Etat », qui ont été, selon lui, « maquillés par les gens au pouvoir », sans détailler davantage. « Je peux vous envoyer le rapport de la Cour des comptes, vous gagnerez du temps », a répondu Gabriel Attal. « Ça vous permet finalement de dire peut-être qu’on ne fera pas le programme de l’ensemble des propositions qui sont là, puisque vous les conditionnez à un audit des finances publiques », a, lui, noté M. Bompard.

Environnement

Manuel Bompard voit dans la lutte contre le changement climatique le « défi du siècle ». « Qu’on fasse bien davantage pour lutter contre le réchauffement climatique », exhorte-t-il. « II faut faire bien davantage dans la rénovation thermique des logements », ajoute-t-il.

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« On a augmenté le budget de la transition écologique de 8 milliards d’euros ! », s’offusque Gabriel Attal. Le changement climatique, « c’est l’un des plus grands défis de notre génération », poursuit M. Attal. « Ces dernières années on a baissé les missions de CO2 de 20 % dans notre pays, c’est inédit, parce qu’on investit pour accompagner les Français », défend le premier ministre. Il dénonce une vision de « décroissance » chez son rival de gauche. « Avec vous, il y aurait moins d’émissions parce qu’il y aurait moins d’agriculteurs », attaque-t-il.

Jordan Bardella dénonce quant à lui l’interdiction programmée à partir de 2035 de la vente de véhicules thermiques neufs, alors que les plus modestes n’auront selon lui pas les moyens d’acheter de l’électrique. Il entend « refaire de la France un paradis énergétique », avec le nucléaire. Il accuse Emmanuel Macron de l’avoir affaibli avec la fermeture de la centrale de Fessenheim. Or l’atome, « c’est bon pour l’environnement parce que c’est décarboné, et aussi pour la facture de nos entreprises ».

Le président du RN a réaffirmé souhaiter un « moratoire sur tout nouveau chantier éolien », ce à quoi le premier ministre lui a rétorqué que « les éoliennes nouvelles installées chaque année, c’est l’équivalent d’un réacteur nucléaire supplémentaire ; si vous arrêtez les éoliennes, alors que la demande des Français va augmenter, la facture des Français va elle aussi augmenter ».

Immigration

« Vous savez, il y a 19 millions de Français qui ont un ancêtre étranger. C’est un Français sur quatre », a rappelé ensuite Manuel Bompard, avant de s’adresser à Jordan Bardella dont une partie de la famille est italienne : « Quand vos ancêtres personnels sont arrivés en France, je crois que vos ancêtres politiques disaient précisément la même chose que ce que vous dites aujourd’hui. » Toujours à destination de M. Bardella, l’« insoumis » trouve ainsi « dramatique » que l’eurodéputé d’extrême droite soit « dans la peau de [ses] ancêtres politiques de l’époque parce qu’[ils] disai[ent] la même chose, [ils] disai[ent] que les Italiens ne pouvaient pas s’intégrer en France, [ils] disai[ent] que les Espagnols ne pouvaient pas s’intégrer ». Pour Manuel Bompard, « les immigrés en France ne coûtent pas de l’argent, ils rapportent de l’argent sur les dix dernières années ». « Augmentons l’immigration alors, on deviendra très riche », a ironisé dans la foulée Jordan Bardella.

Gabriel Attal évoque deux jeunes femmes binationales qui lui ont dit s’être senties « humiliées » par la proposition, faite récemment par Jordan Bardella, de réserver certains emplois stratégiques aux Français qui n’ont pas d’autre nationalité. « Vous voulez mettre un Franco-Russe à la tête d’une centrale nucléaire ? », lui rétorque M. Bardella. M. Attal enchaîne aussitôt en mentionnant Tamara Volokhova, une conseillère du RN dans les instances européennes, et notamment dans la commission des affaires étrangères sur les questions de sécurité et de défense, qui se trouve, précisément, être franco-russe. « Il y a 3,5 millions de Français qui sont stigmatisés par votre proposition » sur les binationaux, poursuit M. Attal. Quant à M. Bompard, il juge que la remise en cause de la « loyauté » des binationaux envers la France est « tout simplement insupportable ».

Sécurité

Gabriel Attal a rappelé avoit fait de la question des mineurs délinquants « sa priorité », rappelant les mesures annoncées en avril, comme la création de travaux d’intérêt généraux pour les moins de seize ans. « Je veux aller plus loin », a-t-il assuré, évoquant notamment « la responsabilisation des parents ». « Il faut qu’on puisse beaucoup plus régulièrement reconnaître le manquement à une obligation parentale », a-t-il estimé. Le premier ministre a aussi plaidé pour permettre la « comparution immédiate pour les mineurs pour qu’il puisse y avoir des sanctions immédiates, notamment en cas de récidive » et défend une atténuation de « l’excuse de minorité ». « Je propose des mesures qui vont permettre d’être beaucoup plus efficaces et d’avoir un principe clair il faut des sanctions plus rapides et plus efficaces », a-t-il ajouté.

« Vous promettez, monsieur Attal, mais vous avez fait quoi ? », a répliqué Jordan Bardella. Pour le député européen d’extrême droite, « il n’y a plus un seul Français, une seule Française qui nous regarde ce soir, qui ne craint pas pour sa sécurité dans l’espace public ». « Il faut un tournant sécuritaire et un tournant pénal », a-t-il plaidé. Le président du RN souhaite notamment rétablir les peines planchers – soit des peines minimales – et suspendre les allocations familiales aux parents de mineurs récidivistes. « Il n’y a aucune raison pour que les Français qui bossent soient contraints de payer la solidarité nationale pour des parents qui sont totalement responsables », a-t-il estimé.

Pour Manuel Bompard, « il faut changer de logique », selon lui, « et d’abord rétablir ce qui a fonctionné : par exemple la police de proximité », qu’il entend faire rétablir dès le mois de juillet si la coalition de gauche remporte les législatives. A Marseille dont il est député, « ce qui a fonctionné contre les trafics, ce n’est pas la communication et les opérations « place nette » [organisées par le ministère de l’intérieur] », mais plutôt les « moyens » supplémentaires donnés à la police judiciaire ou aux douaniers.

Education

Selon Manuel Bompard, le problème de l’école « ce n’est pas l’abaya ». Il a dit vouloir « l’application pleine et entière de la loi de 1905, renforcer les enseignements sur [la laïcité] » et souhaiter, « dès la rentrée prochaine, garantir et assurer la gratuité réelle de l’école ».

« Un enseignant sur deux s’autocensure » sur les sujets qui touchent à la laïcité, assure de son côté Jordan Bardella, qui évoque une « emprise islamiste » sur l’école. Plus largement, il veut un « big bang de l’autorité » à l’école. Et aussi que les téléphones portables soient bannis des établissements pendant les cours, « y compris au lycée ». « Je souhaite poursuivre les expérimentations de l’uniforme », a-t-il ajouté.

Quant à Gabriel Attal, ex-ministre de l’éducation, il vante le dédoublement des classes en zones d’éducation prioritaire. « Comme depuis le début de ce débat, vous êtes satisfait de vous », l’a tancé Jordan Bardella.

Santé

« Il faut plus de médecins ; (…) dès 2018, nous avons fait évoluer ça : en 1998 on formait 3 500 médecins chaque année, en 2018 nous sommes passés à 8 000 et aujourd’hui on est à 12 000

Gabriel Attal a défendu l’augmentation du nombre de médecins formés, passés de « 3 500 en 1998 à 8 000 en 2018 et 12 000 aujourd’hui » ; mais, en attendant qu’ils soient tous formés, le premier ministre a prôné de « déléguer certaines tâches à d’autres professionnels de santé pour libérer du temps médical », rappelant avoir autorisé que les pharmaciens « puissent proscrire des antibiotiques, par exemple en cas d’angine ou de cystite ». Outre un « plan d’urgence pour l’hôpital », Manuel Bompard a mis en avant la nécessité que « tous les services publics essentiels soient à moins de trente minutes de son lieu de vie », ce qui nécessite de « réguler l’installation des médecins ». L’« insoumis » rappelle aussi qu’une proposition de loi avait été rejetée à l’Assemblée nationale lors de la dernière législature par une partie du camp présidentiel et du RN qui visait à réguler l’installation des médecins.

Pour Jordan Bardella, les médecins et soignants doivent « pouvoir continuer à travailler, y compris s’ils sont à la retraite, dans le cadre d’un plan de cumul emploi retraite », avec une exonération d’impôt sur le revenu quand ils sont à la retraite. « Il faut débureaucratiser la santé et redonner le pouvoir aux soignants », a également défendu le président du RN. Il veut « rapprocher la santé du terrain » et entend aussi « départementaliser » la santé, et en finir donc avec le système des agences régionales de santé. A la place, il propose que la santé soit gérée localement par l’intermédiaire d’un préfet délégué.

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Le Monde

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