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On le connaît sous le nom de « gaz hilarant » ou « proto », un gaz détourné en drogue à laquelle sont accros de nombreux consommateurs en raison de ses effets psychoactifs. Dangereux pour la santé, le protoxyde d’azote l’est aussi pour le climat : les émissions de ce gaz à effet de serre, 300 fois plus puissant que le dioxyde de carbone (CO2), se sont envolées ces dernières décennies, dépassant les prévisions. Elles contribuent à mettre en péril les objectifs de lutte contre le changement climatique, selon une étude publiée mercredi 11 juin dans la revue Earth System Science Data.

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Ces travaux, réalisés par cinquante-huit chercheurs internationaux, constituent l’évaluation la plus complète du protoxyde d’azote à l’échelle mondiale. Ils sont publiés dans le cadre du Global Carbon Project, qui établit les bilans réguliers des trois principaux gaz à effet de serre dans l’atmosphère en termes d’abondance : le CO2, puis le méthane (CH4) et le protoxyde d’azote (N2O). Ce dernier, que l’on appelle aussi oxyde nitreux, a contribué à 6,4 % du réchauffement climatique depuis l’ère préindustrielle. Il perdure longtemps dans l’atmosphère (plus d’un siècle) et appauvrit en outre la couche d’ozone dans la stratosphère.

En s’appuyant sur des milliers de mesures, le rapport révèle que les émissions de protoxyde d’azote dues aux activités humaines ont augmenté de 40 % au cours des quatre dernières décennies, pour atteindre plus de 10 millions de tonnes en 2020. Il faudrait à l’inverse diminuer ces rejets d’environ 20 % d’ici à 2050 afin de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, conformément à l’accord de Paris sur le climat.

Résultat : les concentrations de ce gaz dans l’atmosphère ont progressé de 25 % depuis l’ère préindustrielle, passant de 270 parties par milliard (ppb) en 1750 à 336 ppb en 2022, un taux inégalé depuis au moins 800 000 ans. Ces dernières années, les taux de N2O ont « commencé à dépasser les niveaux prévus dans tous les scénarios » du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), indiquent les auteurs.

Une indispensable adaptation des pratiques agricoles

Les trois-quarts des émissions anthropiques de protoxyde d’azote proviennent de l’agriculture. En cause : l’utilisation d’engrais chimiques mais aussi organiques (lisier et fumier) pour fertiliser les cultures. L’azote qui n’est pas absorbé par les plantes, en plus de polluer les sols et les eaux et de favoriser des pics de pollution de l’air, « va être transformé en N2O par les bactéries du sol et être relâché dans l’atmosphère », ajoute Philippe Ciais, climatologue au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement et l’un des auteurs de l’étude. Le protoxyde d’azote est également émis par la combustion des énergies fossiles et de la biomasse, l’industrie du nylon, les déchets et les eaux usées. Enfin, il provient de sources naturelles, comme les forêts tropicales, dont les sols sont riches en azote.

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