Le premier ministre japonais, Shigeru Ishiba, a annoncé sa démission après moins d’un an en fonction, dimanche 7 septembre, période durant laquelle le Parti libéral-démocrate (PLD), sa formation politique, a perdu la majorité absolue dans les deux chambres du Parlement, se voyant contrainte de négocier avec l’opposition. Son parti était au pouvoir quasiment sans interruption dans l’archipel depuis les années 1950.
« J’ai décidé de démissionner de mon poste de président du Parti libéral-démocrate », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse organisée en fin d’après-midi dimanche. « Maintenant que les négociations sur les mesures tarifaires américaines sont arrivées à leur terme, je pense que c’est le moment approprié, a-t-il ajouté. J’ai décidé de me retirer et de laisser la place à la prochaine génération. »
Cette décision n’est pas une surprise tant le chef du gouvernement était sous pression. Mais Shigeru Ishiba avait jusqu’à présent ignoré ces appels, déclarant mardi encore qu’il « prendrait une décision appropriée le moment venu ». Quelques jours auparavant, quatre hauts responsables du PLD, dont le secrétaire général, Hiroshi Moriyama, avaient proposé leur démission, affaiblissant encore un peu plus la position de Shigeru Ishiba.
A peine élu, cet ancien ministre de la défense et de l’agriculture avait convoqué dès octobre des élections législatives anticipées, espérant asseoir son pouvoir. Sa popularité avait chuté, sur fond de flambée inflationniste et de doublement des prix du riz. Le premier ministre a rapidement été fustigé pour ses faux-pas : costume mal ajusté lors d’une cérémonie, sieste en pleine séance au Parlement, le fait de ne pas s’être levé pour saluer d’autres dirigeants lors d’un sommet au Pérou.
Contexte paradoxal
Fils d’un gouverneur régional et issu de la petite minorité chrétienne de l’archipel, M. Ishiba s’était engagé à « créer un nouveau Japon », à revitaliser les régions rurales et à répondre à « l’urgence silencieuse » du déclin démographique.
Cette démission se fait dans un contexte paradoxal puisque Shigeru Ishiba, 68 ans, était en pleine remontée dans les sondages. La cote de popularité de son gouvernement a connu un rebond surprise à la fin d’août, atteignant 39 % d’opinions favorables, soit une hausse record de 17 points par rapport à juillet, selon un sondage publié par le quotidien Yomiuri.
Le journal attribue cette remontée en partie à l’accord commercial conclu à la fin de juillet avec les Etats-Unis (deux jours après les élections au Japon), qui a réduit les droits de douane américains de 25 % à 15 %. Mais cet accord intervient après une longue période d’enlisement des négociations commerciales face à Donald Trump, qui ont fait craindre une absence totale de compromis.
Par contraste, Shinzo Abe, premier ministre japonais à l’époque du premier mandat de Donald Trump, était pour sa part devenu proche du président américain, dont il était réputé avoir l’oreille. M. Abe, qui avait offert à M. Trump un club de golf doré, avait obtenu de rapides résultats dans la guerre commerciale menée alors par les Etats-Unis, parvenant à protéger le Japon de toute surtaxe douanière américaine. « Il n’y en aura jamais un autre comme lui », avait déclaré Donald Trump après la mort de Shinzo Abe, assassiné en 2022.