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Histoires Web vendredi, septembre 27
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Spoiler alert ! Encore que cette alerte ne serve pas à grand-chose. C’est dans le titre même de la série que s’en dévoile l’essence. Entamé comme un polar ordinaire, le récit du Monde n’existe pas se transforme gracieusement, délicatement, impitoyablement aussi, en une méditation ironique, sapant les fondations aussi bien de la réalité que de sa représentation. On a beau parler meurtre et enquête, secrets enfouis depuis des décennies, le frisson que procurent ces quatre épisodes relève plus du vertige esthétique que des poussées d’adrénaline propres aux polars. Il est peut-être moins violent, mais plus rare et plus précieux.

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Devant son écran, Adam Vollmann (Niels Schneider) mène la vie professionnelle d’un journaliste à l’âge numérique. A travers lui passent les tragédies et les histoires absurdes qu’il dispense aux abonnés du site qui l’emploie, sans que rien ne puisse le tirer de sa catatonie. Jusqu’à ce qu’il prenne connaissance d’un fait divers survenu à Guerches-sur-Isoire, ville (fictive) du pays minier nordiste, où une adolescente a été assassinée, sans doute par un professeur de tennis nommé Axel Challe. Adam Vollmann fait valoir à son rédacteur en chef qu’il est un enfant du pays et qu’il connaît le suspect numéro un. A peine envoyé (spécial), Adam manque à tous ses devoirs journalistiques, rendant ses papiers en retard, quand il les rend, s’immisçant dans l’existence des protagonistes du meurtre. Ceux-ci n’obéissent pas plus aux règles du genre, à commencer par la mère de la victime, Mme Montes (Anne Rotger), qui n’a pas hésité à baptiser sa fille Lola.

Motif de l’effacement

Avec ses terrils devenus collines paysagées, ses corons débarrassés de leur suie, Guerches apparaît comme une ville dont le passé est réduit à une série de signes indéchiffrables pour les contemporains. Ce motif de l’effacement court tout au long du Monde n’existe pas. Adam lui-même s’est appelé jadis Corentin. Il a vécu avec Axel Challe un amour de jeunesse intense, et a été persécuté par ses condisciples. L’armure d’indifférence et de muscles que Niels Schneider (qui bénéficie de toute évidence d’un abonnement dans une excellente salle de sport) oppose au monde semble d’abord se fissurer lorsque le passé se manifeste, que ce soit sous la forme de rencontres avec ses tortionnaires d’hier ou de conversations avec l’épouse d’Axel, Sarah (Maud Wyler, qui pousse le sarcasme au niveau d’un art majeur).

Mais au lieu de faire resurgir le vrai Corentin, comme le voudraient les règles habituelles d’un scénario, le voyage à Guerches provoque chez le jeune homme une nouvelle désintégration. Incapable d’accomplir sa mission de journaliste telle que l’a formulée sa hiérarchie (« tu es là-bas pour rendre compte, pas pour enquêter »), il ne parvient pas plus à rassembler les morceaux de son adolescence. Les autres le font pour lui, qui l’accusent tour à tour d’avoir laissé mourir sa mère et d’avoir mis le feu au lycée.

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