Comme il l’avait annoncé, le ministre de la justice, Gérald Darmanin, a rendu visite à Nicolas Sarkozy à la prison de la Santé, dans la soirée mercredi 29 octobre, a fait savoir jeudi une source proche du dossier à l’Agence France-Presse, confirmant une information du Figaro. L’entrevue, qui s’est déroulée en présence du directeur de l’établissement, a eu lieu entre 19 heures et 19 h 45, a poursuivi cette même source.
Quelques jours avant l’incarcération de M. Sarkozy, qui est intervenu le 21 octobre après sa condamnation dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle en 2007, Gérard Darmanin avait fait savoir sur France inter qu’il irait « voir en prison » l’ancien chef d’Etat.
Relevant que le garde des Sceaux pouvait « aller voir n’importe quelle prison et n’importe quel détenu quand il le souhaite », Gérald Darmanin ne voit aucune atteinte à l’indépendance de la justice dans sa promesse de visite : il est de sa responsabilité de s’assurer de la bonne organisation de cette détention hors norme comme de la sécurité de l’ancien chef de l’Etat, a-t-il fait valoir.
Critiques de Rémy Heitz
Un choix toutefois critiqué par le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, qui dirige le parquet de la Cour de cassation et copréside le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Pour celui ci un telle visite pose un « risque d’obstacle à la sérénité » de la justice, et « donc d’atteinte à l’indépendance des magistrats ».
« S’assurer de la sécurité d’un ancien président de la République en prison, fait sans précédent, n’atteint en rien à l’indépendance des magistrats mais relève du devoir de vigilance du chef d’administration que je suis, responsable devant le Parlement selon l’article 20 de la Constitution », avait répliqué le ministre de la justice. Cet article dispose que « le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation » et « dispose de l’administration et de la force armée ».
L’ancien président de la République bénéficie par ailleurs de la protection de deux officiers de sécurité, une mesure exceptionnelle prise « eu égard à son statut et aux menaces qui pèsent sur lui », avait expliqué le ministre de l’intérieur, Laurent Nuñez.
Nicolas Sarkozy reçu par Emmanuel Macron avant son incarcération
La gauche avait aussi fustigé le fait que M. Sarkozy ait été reçu quelques jours avant son incarcération par le président de la République, Emmanuel Macron. Il était « normal », « sur le plan humain », de recevoir son prédécesseur, s’était alors justifié lundi Emmanuel Macron ajoutant avoir « des propos publics toujours très clairs sur l’indépendance de l’autorité judiciaire ».
Le fait de recevoir à l’Elysée et d’aller visiter en prison Nicolas Sarkozy, « condamné pour des faits extrêmement graves » dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007, « ne correspond pas au respect des institutions », avait pourfendu le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure.
Le 25 septembre, le tribunal correctionnel de Paris avait condamné l’ancien président à cinq ans de prison. Il a été reconnu coupable d’avoir, en toute connaissance de cause, laissé ses collaborateurs Claude Guéant et Brice Hortefeux rencontrer à Tripoli un dignitaire du régime de Mouammar Kadhafi pour discuter d’un financement occulte de sa campagne présidentielle de 2007. L’ancien chef de l’Etat a fait appel et se dit innocent.













