Le meurtrier d’Aboubakar Cissé, le jeune Malien de 22 ans tué dans la mosquée de La Grand-Combe (Gard) le 25 avril, a agi « dans un contexte isolé » et « sans revendication idéologique ou lien avec une organisation qui diffuserait une revendication idéologique », a fait savoir, vendredi 2 mai, la procureure de Nîmes, Cécile Gensac, justifiant la non-saisie du Parquet national anti-terroriste (PNAT). « Les faits paraissent à ce stade construits autour de l’envie obsessionnelle de tuer une personne », d’une « envie de tuer quelqu’un, quelle que soit la cible », sur fond de « fascination morbide », a souligné la magistrate lors d’une conférence de presse, précisant que le PNAT « demeurera en observation » sur ce dossier sensible.
Dimanche, Me Mourad Battikh, un des avocats de la famille de la victime, a affirmé qu’il ne fait « aucun doute » que ce meurtre est « une attaque de nature terroriste ». « La communauté musulmane doit bénéficier du même traitement que tout autre citoyen », a ajouté Me Battikh.
Les avocats de la famille d’Aboubakar Cissé ont par ailleurs annoncé à plusieurs médias vendredi leur intention de déposer une plainte avec constitution de partie civile pour que l’enquête soit requalifiée en assassinat terroriste.
Confiée à un juge d’instruction du pôle criminel de Nîmes, l’enquête sur l’affaire a été ouverte lundi pour « meurtre aggravé par préméditation et à raison de la race ou de la religion ».
Le mis en cause devrait rentrer en France « autour de la mi-mai »
En fuite pendant près de trois jours, Olivier Hadzovic, le meurtrier d’Aboubakar Cissé – lardé de dizaines de coups de couteau le 25 avril vers 9 h 30, dans la salle de prière de la mosquée Khadidja, à La Grand-Combe, petite commune gardoise de moins de 5 000 habitants au nord d’Alès – s’est rendu le 27 avril dans la nuit en Italie, au commissariat de Pistoia, près de Florence, accompagné d’une tante et d’un avocat.
Olivier Hadzovic, un Français de 20 ans également domicilié sur la commune de La Grand-Combe, « a consenti à être remis à la France car il veut rentrer chez lui », a précisé mercredi son avocat italien, Me Giovanni Salvietti. « Et donc la procédure d’extradition accélérée a été mise en place, ce qui permettra à Olivier de pouvoir rentrer en France autour de la mi-mai », a-t-il ajouté.
Selon les premiers éléments de l’enquête, Olivier Hadzovic avait fait part très peu de temps auparavant sur les réseaux sociaux, notamment via la plateforme Discord, de son intention de « violer des femmes, de tuer ». Banni du réseau, il y était revenu sous de nouveaux profils.
Selon une jeune femme qui avait signalé ses posts récents, il avait ainsi précisé « en amont qu’il allait s’en prendre physiquement à quelqu’un, sans préciser ni qui ni où, et sans faire référence à une ethnie ou une religion, épris d’une volonté farouche de tuer quelqu’un et à défaut de se suicider, le tout comme un acte libérateur », a rapporté Mme Gensac, détaillant ensuite la discussion du jeune homme le jour même sur la plateforme.
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« Je vais le faire aujourd’hui, je vais le faire dans la rue », dit Olivier Hadzovic, le vendredi 25 avril au matin. « Tu le connais ? », lui répond un interlocuteur.« Non » répond-il. « Je vais m’attaquer à la mosquée ? Je n’ai pas trop d’idée ». Puis, une fois sur place, devant la mosquée Khadidja, il lâche : « Il est noir [Aboubakar Cissé], je vais le faire ».
Dans ses premières déclarations aux enquêteurs italiens, le jeune homme a reconnu le meurtre d’Aboubakar Cissé, mais nié avoir agi par haine de l’islam, déclarant, selon son avocat, « avoir tué la première personne qu’il a trouvée » sur son chemin. Dans une vidéo qu’il a filmée juste après le meurtre, le meurtrier est pourtant entendu insulter clairement la religion de sa victime agonisante : « Je l’ai fait (…), ton Allah de merde », répète-t-il à deux reprises.