Quel sera l’avenir des loups en Europe ? Ces dernières décennies, ces prédateurs ont fait un retour réussi sur le continent. Quasiment éradiqués d’Europe de l’Ouest au milieu du XIXe siècle, ils sont désormais présents dans quasiment tous les pays de l’Union. Une décision adoptée, mardi 3 décembre, pourrait toutefois enrayer cette dynamique positive pour l’espèce : réunis à Strasbourg, les 50 Etats membres de la convention de Berne, un traité de référence pour la protection de la faune et de la flore d’Europe signé en 1979, ont voté en faveur d’un abaissement de son niveau de protection.
Ce choix inédit survient dans un contexte de montée en force de la droite et de l’extrême droite et de vives batailles politiques autour des sujets agricoles et environnementaux. Très critiqué par les scientifiques et les ONG, il ouvre la voie à un changement de statut similaire au sein de l’Union européenne (UE), le loup étant amené à passer d’espèce « strictement protégée » à « protégée ». Il fait craindre une augmentation des abattages dans certains pays, mais aussi un détricotage plus large de la directive européenne « Habitats », un texte clé pour la protection de la nature.
« Les loups deviennent les premières victimes de décisions politiques qui ne sont pas basées sur la science, ce qui crée un dangereux précédent, dénonce Sabien Leemans, du Fonds mondial pour la nature, au nom d’une coalition d’ONG. Cela porte atteinte à des décennies d’efforts de conservation et va détourner l’attention des mesures de prévention des dommages qui sont la meilleure solution pour favoriser la coexistence. »
Ce déclassement était réclamé par les représentants des éleveurs et des agriculteurs, qui dénoncent une pression trop forte exercée par le prédateur. « La décision de la convention de Berne est plutôt favorable et va dans le sens d’une meilleure régulation de l’espèce, mais ce n’est qu’une première étape, réagit Claude Font, chargé de la prédation à la Fédération nationale ovine. Il faudra ensuite que ça avance aux niveau européen et français. »
Le vote de mardi est l’aboutissement d’un processus amorcé il y a deux ans. Après une résolution du Parlement européen sur le sujet, adoptée fin 2022, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’empare du dossier, en septembre 2023. « La concentration de meutes de loups dans certaines régions européennes est devenue un réel danger pour le bétail et, potentiellement, pour l’homme », déclare-t-elle. Trois mois plus tard, alors qu’elle n’est pas encore officiellement candidate à sa réélection, elle met sur la table une proposition de révision du statut.
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