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Le laboratoire Servier a annoncé, vendredi 6 septembre, qu’il renonçait pour le moment à la vente de sa filiale Biogaran, leader des médicaments génériques en France, mettant fin, à ce stade, à un feuilleton industriel mais aussi politique sur la souveraineté sanitaire. Dans un courrier interne adressé aux salariés, dont l’Agence France-Presse a obtenu copie, le groupe Servier annonce avoir « reçu des marques d’intérêt de la part d’investisseurs internationaux pour Biogaran », mais avoir décidé de mettre fin aux discussions avec les acteurs concernés.

« La création de valeur proposée ne nous apparaissait pas bénéfique » pour l’entreprise, ses collaborateurs, le tissu industriel franco-européen, ainsi que les patients, pharmacies et partenaires, écrit Olivier Laureau, président de Servier, dans ce courrier. « De plus, les incertitudes politiques et réglementaires ont pesé sur ces marques d’intérêt », ajoute-t-il.

Cette décision met fin à des mois de spéculations sur l’avenir du leader français du médicament générique, qui écoule 320 millions de boîtes par an dans l’Hexagone. Depuis les rumeurs de cession, qui ont circulé dès fin 2023, Servier n’avait pas officiellement communiqué ses intentions vis-à-vis de sa filiale, lancée en 1996 sur le marché des génériques et devenue depuis la plus importante marque de génériques en France.

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Un dossier politique

Dès le printemps, l’exécutif était monté au créneau pour mettre en garde contre une éventuelle mise en vente de ce laboratoire, qui détient près d’un tiers du marché des génériques en France. Un dossier sensible donc, dans un contexte de pénuries de médicaments et d’efforts entrepris au sommet de l’Etat pour relocaliser des médicaments essentiels et pour attirer des investissements supplémentaires dans la santé.

Deux acteurs pharmaceutiques indiens avaient été identifiés comme candidats, Aurobindo et Torrent Pharmaceuticals, en plus du fonds britannique BC Partners, qui avait déposé, en juin, une offre en tandem avec Bpifrance. La société pharmaceutique française Benta Lyon s’était également positionnée. Il était redouté qu’un acquéreur étranger puisse arrêter certains produits ou en fasse produire ailleurs.

A plusieurs reprises, l’exécutif a assuré que des « conditions drastiques » seraient mises en place en cas de repreneur étranger, avec la possibilité d’activer le contrôle des investissements étrangers en France pour ne pas compromettre la souveraineté sanitaire.

Après la démission du gouvernement, les représentants du personnel avaient tiré la sonnette d’alarme dans une pétition pour mobiliser l’opinion publique. Ils ont alerté sur les risques liés à une « perte de souveraineté si la production est délocalisée », ce qui pourrait se traduire par « moins de réactivité face à des crises sanitaires », « plus de ruptures de stocks en pharmacies » et « la suppression d’emplois au sein de Biogaran et de ses sous-traitants ». Ils disaient également craindre une accélération du processus de vente dans l’attente de la nomination d’un nouveau gouvernement.

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Certaines offres auraient atteint « plus d’un milliard d’euros »

Le génériqueur, qui compte 240 salariés, réalise actuellement la moitié de sa production en France, via sa quarantaine de sous-traitants qui fabriquent pour lui. De lui dépendent ainsi 8 600 emplois. Mais avec 1,2 milliard d’euros de ventes, il représente moins d’un quart du chiffre d’affaires de sa maison-mère. Il n’a pas été question de prix dans ce point d’information contenu dans le courrier interne.

Selon une source proche du dossier consultée par l’Agence France-Presse, certaines offres ont atteint « plus d’un milliard d’euros » mais « la question du prix n’a pas été un critère prépondérant » dans la décision de Servier. Le groupe ne jette toutefois pas définitivement l’éponge. « Nous pourrons initier de nouvelles revues stratégiques à l’avenir comme nous le faisons régulièrement pour évaluer le potentiel de nos activités », souligne-t-il.

Pour une entreprise de taille moyenne comme Servier, les moteurs de croissance sont ailleurs, prioritairement dans l’innovation en oncologie, une expertise plus lucrative que celle des génériques.

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Le Monde avec AFP

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