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Histoires Web samedi, juillet 27
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Le soir tombe sur Abano Terme. Dans cette ville d’eau vénète, la morte saison s’attarde et les rues bordées de grands hôtels aux silhouettes cubiques sont désertes. Devant le théâtre Pietro d’Abano, pourtant, deux fourgons de police sont stationnés. Sous peu, un candidat singulier aux élections européennes va rencontrer un public acquis. Le général Roberto Vannacci, 55 ans, phénomène médiatique, idole de la droite dure, est en campagne.

Dans l’espoir d’enrayer son déclin dans les sondages, la Ligue (extrême droite) l’a placé en tête de liste dans deux circonscriptions. La loi italienne autorise les militaires à se présenter à des élections tant qu’ils ne font pas campagne en uniforme. Lors de sa dernière apparition publique, à Naples, des protestataires de gauche ont affronté les forces de l’ordre qui assurent désormais la sécurité de ses conférences, lui permettant une nouvelle fois de se déclarer attaqué dans sa liberté d’expression.

Dans la salle, petite mais comble, l’apparition du militaire en blazer et chemise à rayures provoque des applaudissements nourris. Les membres du public se sont acquittés de la somme de 15 euros pour assister à la présentation de son dernier livre, Il corraggio vince (« le courage gagne », Piemme, non traduit). Lui avance calmement vers la scène, léger sourire aux lèvres, regard bienveillant mais perçant. Prenant place entre un piano à queue et l’animateur de la soirée, veste bleu électrique et col roulé blanc, le général est venu délivrer son message : « Etre normal aujourd’hui, c’est être révolutionnaire. »

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Or être normal pour le général, c’est être blanc, hétérosexuel, propriétaire d’une voiture à moteur thermique. C’est donc être menacé par une pieuvre invisible mais toute puissante : le « politiquement correct », « le lobby gay », « les féministes extrémistes », « la cancel culture », « l’idéologie woke » et surtout « l’idéologie green ». Selon le militaire, ces mouvements conspirent à « la destruction de l’Occident », une entreprise reprise par les « bien-pensants » là où les « marxistes » avaient échoué.

Accusations de racisme et d’homophobie

Son premier pamphlet, Il mondo a contrario (« le monde à l’envers », non traduit), publié à compte d’auteur en août 2023 alors qu’il n’était qu’un parfait inconnu, lui a valu des accusations de racisme et d’homophobie. Des articles hostiles de la presse nationale lui ont ensuite fourni une publicité bienvenue. Se sont ensuivis quelques jours de polémiques, marqués par le désaveu du ministre de la défense, Guido Crosetto, qui ont fait grimper les ventes à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires et ont propulsé l’auteur sur les plateaux et sur les routes du pays. Chacune de ses déclarations est depuis commentée, contestée et donc relayée quasi quotidiennement.

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