La crise ouverte par la chute du gouvernement Bayrou, lundi 8 septembre, n’est pas la première que traverse le pays. Du début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron à ce jour, l’ordinaire aura été fait d’une succession de secousses sociales et politiques qui ont eu raison du fait majoritaire, ébranlé le fonctionnement de la Ve République sans pour autant déboucher sur une crise de régime. Le mouvement des « gilets jaunes », durant l’hiver 2018-2019, n’a pas empêché la réélection, trois ans plus tard, du président sortant. Il a en revanche contribué à saper sa légitimité en mettant en lumière le décrochage d’une partie des classes populaires et moyennes face à la hausse du coût de la vie et à l’érosion du pouvoir d’achat.
Née spontanément en réaction à la montée en puissance de la taxe carbone qui majorait le prix des carburants, échappant à tout contrôle politique et syndical, la révolte a aussi révélé l’ampleur de la fracture démocratique. Une forte revendication de démocratie directe a émergé face à un système représentatif dans lequel les intéressés ne trouvaient plus leur compte.
Quatre ans plus tard, le puissant mouvement social de l’hiver 2023, dirigé contre la réforme des retraites et cette fois encadré de bout à bout par l’intersyndicale, a accentué l’isolement du président de la République. Parce qu’il avait exposé son projet durant la campagne et qu’il l’estimait validé par le résultat de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron avait cru bon d’engager le passage à 64 ans alors même qu’il ne disposait plus de majorité absolue à l’Assemblée nationale.
Lourd ressentiment
Politiquement et socialement, le contentieux s’est révélé très lourd. Il s’est soldé dans les urnes, en 2024, après une dissolution de l’Assemblée nationale aux effets délétères : à la perte de la majorité s’est ajouté le lourd ressentiment d’une partie non négligeable d’électeurs ayant l’impression que la victoire leur avait été volée. C’est le cas des électeurs de gauche comme de ceux du Rassemblement national (RN). Depuis, la France, inapte au compromis, vivote dans un environnement international particulièrement chahuté et dangereux, sans perspective d’avenir, au rythme de la chute, en moins de douze mois, de deux gouvernements, celui de Michel Barnier puis de François Bayrou.
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