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Histoires Web jeudi, novembre 14
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De nombreux scientifiques doivent parfois avoir le sentiment de traquer une lueur dans l’obscurité. Xinhua Fu, chercheur à l’université agricole de Huazhong, à Wuhan (Chine), a pris cette métaphore pour argent comptant et s’en est fait une spécialité. Il s’intéresse aux lucioles, ces petits coléoptères qui émettent de la lumière, à qui il a consacré de nombreux articles depuis sa thèse, en 2004.

Mais il n’est manifestement pas le seul à avoir étudié les particularités bioluminescentes de ces insectes. L’araignée de l’espèce Araneus ventricosus semble avoir compris depuis bien longtemps que le signal lumineux produit par les lucioles mâles diffère de celui qui est émis par les femelles. Dans un article publié le 19 août dans Current Biology, dont le premier auteur n’est autre que Xinhua Fu, on découvre que cette araignée a imaginé un piège diabolique à partir de ce savoir.

Lorsque, la nuit venue, elle attrape dans sa toile géométrique fraîchement tissée une luciole mâle, plutôt que d’en faire son repas, elle va s’en servir d’appât pour améliorer son ordinaire. Après avoir harnaché ce pauvre insecte à ses fils de soie, elle le pique de son venin et se replie discrètement. La luciole mâle ne succombe pas et continue d’envoyer des signaux lumineux grâce à son appendice. Mais ils sont détraqués… et ressemblent aux signaux émis par les femelles.

Manipulation

La nature est ainsi faite que certains mâles de passage ne résistent pas à pareil clin d’œil et se précipitent dans la toile. Jacques Dutronc pouvait être fier de son « piège à filles », Araneus ventricosus rivalise avec son « joujou extra » qui fait tomber les garçons dans son assiette.

Pour arriver à cette découverte, les chercheurs chinois ont fait les choses sérieusement, en pleine campagne. Alors que cette espèce d’araignées fabrique chaque soir une nouvelle toile, ils en ont disposé 161 dans quatre configurations : araignée présente ou non sur la toile et luciole piégée émettant ou non le signal lumineux ressemblant à celui des femelles. Les caméras n’avaient plus qu’à filmer.

Le résultat de l’expérience est sans appel : « Le taux de capture était plus élevé lorsque les signaux des mâles piégés étaient visibles en présence d’une araignée par rapport aux autres conditions », écrivent les auteurs de l’étude. « Nos résultats montrent que les signaux émis par les mâles piégés dans des toiles en présence d’araignées ressemblent à ceux qui sont émis par les femelles, mais diffèrent des signaux émis par les mâles en liberté et par les mâles dans des toiles sans araignées », notent les chercheurs. En revanche, lorsque ces cobayes ont été précautionneusement retirés de la toile, ils ont repris leur schéma normal de clignotement.

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