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L’ancien député du Rhône Hubert-Julien Laferrière, dont le nom apparaît dans un vaste dossier portant sur des soupçons d’ingérences étrangères, a été mis en examen, mercredi 24 juillet, des chefs de « corruption passive » et « trafic d’influence passif en bande organisée par un élu public », a appris Le Monde de source judiciaire. L’ex-élu a été présenté à un juge après près de 48 heures de garde à vue. Il reste libre, sous contrôle judiciaire.

Le responsable politique lyonnais, passé par la majorité présidentielle puis par le groupe parlementaire Ecologiste-Nupes, et qui a fini son mandat parmi les députés non-inscrits, est soupçonné d’avoir touché à plusieurs reprises des rémunérations en échange de prises de parole publiques, y compris à l’Assemblée nationale.

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Cette mise en examen s’ajoute à de nombreuses autres découlant de l’information judiciaire ouverte par le Parquet national financier, et désormais entre les mains de deux juges d’instruction. En 2023, le lobbyiste Jean-Pierre Duthion, également soupçonné dans ce dossier, a été mis en examen des chefs de « corruption privée », « corruption d’agent public » et « trafic d’influence d’agent public ». L’ancien journaliste de BFMTV Rachid M’Barki, en lien avec M. Duthion et qui a reconnu en garde à vue avoir diffusé des sujets litigieux dans le journal de la nuit contre rémunération, a lui été mis en examen pour « abus de confiance » et « corruption privée passive ». Il avait été licencié par BFMTV fin février 2023.

Un vaste dossier

Ce dossier aux multiples ramifications est né des révélations du Monde, de Radio France, de Forbidden Stories et de plusieurs partenaires internationaux dans le cadre de l’enquête Story Killers, publiée en février 2023. Portant sur les ingérences étrangères, elle révélait notamment le rôle, en France, du lobbyiste Jean-Pierre Duthion et de Rachid M’Barki, dans de multiples campagnes d’influence sur le territoire français.

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Peu après cette publication, Médiapart a révélé qu’Hubert Julien-Laferrière, à l’époque député du Rhône, entretenait des liens avec Jean-Pierre Duthion, ancien fixeur en Syrie devenu agent d’influence pour de nombreux clients. Le site mettait alors en avant une étrange intervention de l’élu en faveur d’une cryptomonnaie frauduleuse, le Limocoin.

Rapidement, le rôle joué par Hubert Julien-Laferrière s’est retrouvé au centre de l’enquête en raison de multiples interventions de l’élu, en faveur aussi bien de l’opposante béninoise Reckya Madougou, d’un ancien premier ministre kazakh, mais surtout du Qatar, avant la tenue en novembre et décembre 2022 du Mondial de football dans l’émirat.

En commission ou en séance, M. Julien-Laferrière a publiquement repris à plusieurs reprises des arguments en faveur du Qatar, parfois à rebours des positions de son groupe parlementaire de l’époque. Or, l’ex-député est soupçonné d’avoir entretenu, par l’intermédiaire de Jean-Pierre Duthion, des liens avec Nabil Ennasri, un politologue spécialiste du Qatar aujourd’hui vu par les enquêteurs comme un potentiel agent d’influence et mis en examen des mêmes chefs que M. Duthion.

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Des fonds qataris

Selon les informations du Monde, l’ancien député aurait été rémunéré, pendant une période d’environ un an, 5 000 euros par mois via M. Ennasri et M. Duthion, avec des fonds qui proviendraient d’une ambassade qatarie et du Comité national des droits de l’Homme, un organisme d’Etat qatari. En mai, Le Monde a révélé des captures d’écran montrant des échanges, au cours de l’été 2022, entre Hubert-Julien Laferrière et Jean-Pierre Duthion : « On s’est mis d’accord, ce mois-ci, je te donne 10k, alors que l’on ne va rien faire, à part Reckya. Sur tout le reste, je te laisse tranquille, Azerbaïdjan, etc. Je te préserve. Cette question était réglée. Je dois renégocier, à chaque fois, c’est lourd. On est dans un rapport de force. (…) Pour 10k, je te demande rien, à part Reckya. Et le fait de te tenir à une stratégie », écrivait ainsi Jean-Pierre Duthion.

Sollicitée, l’avocate de M. Julien-Laferrière, Me Marie Dosé, n’a pas souhaité réagir. En mai, l’élu avait, dans un communiqué transmis par son avocate, contesté « avec la plus grande fermeté toutes les accusations portées contre » lui, tout en ajoutant : « mes interventions politiques et citoyennes ont pour seul moteur la défense des droits humains à l’étranger – y compris les droits des travailleurs étrangers sur les chantiers de la Coupe du monde au Qatar, dont j’ai condamné les conditions de travail à de nombreuses reprises – qui se trouve être au cœur de mon engagement depuis plus de vingt ans ».

M. Julien-Laferrière, qui bénéficiait jusqu’à peu de l’immunité parlementaire, ne s’est pas représenté aux élections législatives, après la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Emmanuel Macron le 9 juin. Il expliquait mi-juin à 20 Minutes avoir décidé de se consacrer à un autre engagement, qu’il décrit comme sa « passion secrète » : la protection des grands singes.

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