« L’Albatros », de Raphaël Enthoven, L’Observatoire, 240 p., 22 €, numérique 15 €.
Face à une maladie dégénérative, qui vous prive de l’usage normal de votre corps, qui entrave même l’exercice de votre volonté, la musique ne peut pas grand-chose. Ce constat d’impuissance sous-tend L’Albatros, le récit que Raphaël Enthoven consacre aux dernières années de la vie de sa mère, l’écrivaine et plume du Nouvel Obs Catherine David, morte en janvier 2023 des suites de la maladie de Parkinson. Pour cette pianiste « amatrice de haut vol », l’auteur aurait aimé croire à une « fonction résurrectrice » de la musique. Las. Le piano fait bien plutôt office de révélateur de la dégradation des facultés de sa mère : une rare fausse note échappée à sa main gauche, puis la peur chronique que celle-ci refuse soudain de lui obéir, présagent de la paralysie qui s’emparera plus tard de tout le côté gauche du corps de Catherine David.
Comme pour inverser l’issue de ce combat, Raphaël Enthoven mêle à la description saisissante de la dégénérescence physique puis mentale de sa mère le récit de son amour pour la musique, de ses affinités intellectuelles et artistiques. Alternant passages narratifs, détours philosophiques et dialogues, il dresse de Catherine David un portrait littéraire et musical, qui tend par endroits au panégyrique. Ce ton laudatif n’empêche pas la transcription d’une relation mère-fils complexe, marquée à la fois par un amour profond et par une culpabilité mutuelle de ne pas avoir été assez présent, ou trop passif, lorsque l’autre en avait besoin : tout au long de sa maladie, pour Catherine David ; lorsque son beau-père le frappait, pour Raphaël Enthoven.
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