Place de la Bourse, à Paris, face aux colonnes du Palais Brongniart se dresse un autre bâtiment chargé d’histoire : le siège de l’Agence France-Presse (AFP). Des générations de journalistes ont travaillé ici, et d’autres continuent de s’y activer pour envoyer leurs dépêches aux médias du monde entier. Ils étaient quelques centaines lorsque l’AFP s’est installée dans ces murs, en 1944 ; ils sont aujourd’hui près de 2 000, répartis en France et à l’étranger.
Du temps de la guerre froide, cette omniprésence discrète et ce rôle central dans la diffusion de l’information faisaient de l’agence une cible prioritaire du renseignement soviétique. Les archives du KGB transmises en 1992 aux Britanniques après la chute de l’URSS par le transfuge Vassili Mitrokhine livrent aujourd’hui des informations inédites sur le niveau de pénétration des espions de Moscou au sein de l’AFP. Les notes Mitrokhine, que Le Monde a pu consulter à Cambridge, en Angleterre, nous apprennent en effet que le KGB avait recruté six journalistes de l’AFP comme agents entre 1956 et 1982. Les noms de trois d’entre eux peuvent être révélés.
Le plus capé, toujours élégant, faussement nonchalant, a marqué la mémoire de l’entreprise par les hautes fonctions qu’il a occupées. Son nom était Francis Lara. Né le 3 août 1925, à Paris, il a grandi dans le monde de la presse. Son père, René Lara, fut directeur du Gaulois, quotidien de la noblesse et de la grande bourgeoisie ayant fusionné avec Le Figaro dans l’entre-deux-guerres. Licencié en anglais, il est embauché à l’AFP en 1946. Commencée en bas de l’échelle, sa carrière s’achèvera au sommet, lorsqu’il cumulera, en 1982, les fonctions de patron de l’information et d’adjoint du PDG de l’agence.
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