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Histoires Web lundi, juin 24
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Rares sont les grands fauves de l’art moderne à avoir transmis leur talent à leur progéniture. Même les plus créatifs des descendants se gardent bien de s’aventurer sur le terrain de leurs aînés. Plutôt que de prendre les pinceaux, Paloma, fille de Pablo Picasso, a raisonnablement préféré briller dans la mode. Pierre Matisse, le fils d’Henri, s’est bien fait un prénom, mais en qualité de galeriste, non sans avoir veillé à mettre un océan entre lui et son père en migrant dès 1924 vers New York. Jean Renoir plaçait bien la peinture au sommet de la hiérarchie des arts, mais le fils d’Auguste, maître de l’impressionnisme, a jugé plus sage d’imposer son nom dans le septième art.

Seffa Klein, 28 ans, ne s’est pas laissé écraser par le poids de la filiation. Dès son plus jeune âge, elle s’est revendiquée artiste. Comme son grand-père Yves Klein, chantre mondialement reconnu de l’immatériel et du monochrome, fauché en 1962 par une crise cardiaque à l’âge de 34 ans. Lui-même était né de parents artistes : Marie Raymond (1908-1988), l’une des rares femmes peintres d’après-guerre à avoir exposé aux côtés des abstraits Pierre Soulages et Hans Hartung ; et Fred Klein, un peintre de chevaux d’origine javano-néerlandaise, ami et courtier de Piet Mondrian. Comme son père, Yves Klein a épousé une artiste, Rotraut Uecker, âgée aujourd’hui de 85 ans, peintre de l’horizon et du cosmos, qui a pour frère Günther Uecker, 94 ans, figure de l’avant-garde allemande, dont les panneaux blancs plantés de clous sont dans les collections du Centre Pompidou, à Paris, et au MoMA, à New York.

Face à ces totems de l’histoire de l’art, la jeune Seffa aurait pu vouloir exprimer sa singularité, marquer sa différence. S’inquiéter qu’on ne voie en elle qu’une nepo baby, ces rejetons de célébrités auxquels il est reproché de réussir sans avoir à fournir un talent particulier. « Etre la petite-fille d’Yves Klein, c’est juste un fait », déclare-t-elle calmement, le 13 mai, à Paris. Sans craindre la comparaison, Seffa Klein a invité son illustre parentèle à partager les cimaises de l’exposition (intitulée « Une constellation familiale ») que lui consacre jusqu’au 13 juillet la galerie Poggi, à Paris. Trois œuvres d’Yves Klein, un assemblage clouté de Günther Uecker, deux paysages cosmiques de Rotraut Klein-Moquay, ainsi qu’une toile parsemée de signes de Marie Raymond viennent escorter ses propres tableaux, puissants précipités alchimiques composés de fleurs, de verre tissé et de bismuth, un métal cristallin.

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