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Remontez dans le temps. De deux ans plus précisément. Souvenez-vous, l’actualité ne bruissait pas, alors, des atermoiements d’un président cherchant un premier ministre, mais de la disparition d’un simple condiment. Les médias faisaient monter la sauce sur la pénurie de moutarde, illustrée par des rayons de supermarchés clairsemés.

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Rien de tel cette année. Les magasins sont achalandés et le voile de l’indifférence est retombé sur ce produit enflaconné. Pourtant, dans les champs en Bourgogne, les agriculteurs ont œuvré, cet été, pour récolter la précieuse graine piquante. Avec succès. « L’objectif, en 2024, était une production de 12 000 tonnes et il devrait être atteint », affirme Luc Vandermaesen, résident de l’Association des producteurs de graine de moutarde de Bourgogne. Un résultat à comparer aux 6 000 tonnes collectées en 2022.

Ce doublement des volumes résulte d’une volonté délibérée de relocaliser la culture. La moutarde se pique de revanche. Lorsque les pots du condiment jaune ont commencé à se faire rares, les Français ont, en effet, découvert que la culture de la graine s’était égrenée au fil du temps dans l’Hexagone. Et que la moutarde de Dijon dépendait essentiellement de l’approvisionnement canadien. Or, en 2021, la culture des champs de moutarde outre-Atlantique avait tourné à l’aigre, réduite de moitié par une météo défavorable.

Météo capricieuse

Pour limiter cette dépendance, source de fragilité pour les industriels et les distributeurs, les céréaliers tricolores ont été incités à replanter. Mais on n’attire pas les planteurs de moutarde avec du vinaigre, plutôt avec des marges bien huilées. Le cours de la graine bourguignonne, qui était de 900 euros la tonne en 2021, a été propulsé à 2 000 euros en 2023. Sans surprise, la surface consacrée à cette culture est immédiatement montée en graine, passant de 4 000 à plus de 10 000 hectares. Las, en 2023, la météo a été capricieuse et la collecte a été maigrelette à 9 200 tonnes, loin des objectifs fixés à 15 000 tonnes.

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Pour autant, les céréaliers ont peu ou prou continué l’essai en 2024, même si le cours de la graine a un peu piqué du nez, à 1 600 euros la tonne. Comme pour toutes les cultures cette année, les agriculteurs ont traversé des périodes de fortes inquiétudes pendant la campagne, les pluies incessantes et l’absence de luminosité pesant sur l’état des brassicacées. Mais une quinzaine de jours de soleil en mai ont fort heureusement coloré les champs en jaune et sauvé la récolte.

« Cette année, 35 % de nos fabrications sont faites avec des graines françaises et nous voulons monter à 50 % en 2025 », affirme M. Vandermaesen, également directeur général de la société Reine de Dijon. Reste à savoir si le consommateur est prêt à payer pour le « cultivé en France », sachant qu’entre pénurie et inflation le prix du condiment a bondi. « Le budget moutarde des ménages est passé de 4 à 7,30 euros par an », relativise M. Vandermaesen. Une augmentation pas piquée des hannetons.

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