La bande de Gaza est répartie en cinq gouvernorats dont le plus méridional est Rafah, qui comptait plus de 250 000 habitants en 2023. L’armée israélienne y a mené, depuis lors, une véritable campagne d’annihilation du tissu urbain, qui s’est intensifiée ces derniers mois.
Il n’en est que plus important de rappeler que la très longue histoire de Rafah remonte au deuxième millénaire avant notre ère, lorsque les Pharaons la développent pour assurer le contrôle de leur domaine de Canaan. C’est à Rafah, en − 720, que les Egyptiens sont vaincus par les Assyriens, eux-mêmes remplacés par les Babyloniens, puis par les Perses, au cours des siècles suivants. Les souverains d’Alexandrie et d’Antioche se livrent à Rafah, en − 217, une bataille où s’affrontent des dizaines de milliers de soldats, appuyés, dans les deux camps, par des éléphants de combat.
L’historien grec Polybe, décédé en − 120, considère que Rafah est la dernière cité d’Asie avant l’Afrique de la péninsule égyptienne du Sinaï.
La « citadelle du Sud »
Rafah devient, au Ve siècle de notre ère, le siège d’un évêché dans la province byzantine de Palestine. Cette division administrative de Palestine est préservée, deux siècles plus tard, par les conquérants arabes qui font de Rafah leur « citadelle du Sud ». Il s’agit en fait moins d’une place forte que d’un carrefour commercial, en lisière du désert égyptien, avec ses marchés et ses caravansérails, ainsi que, plus tardivement, un relais de poste.
La fondation, en 1387, de Khan Younès, sur la route de Gaza, détourne les échanges régionaux vers cette nouvelle ville, entraînant le déclin de Rafah, qui n’est plus qu’une bourgade de quelques centaines d’habitants, tous musulmans, durant la période ottomane. Mais, lorsque les Britanniques, maîtres de l’Egypte, délimitent, en 1906, avec les Ottomans, la frontière entre le Sinaï et la Palestine, ils prennent soin de la tracer à l’intérieur même de Rafah. Ils garantissent ainsi à la ville un statut de zone franche, où négociants et bédouins peuvent circuler librement de part et d’autre d’une frontière largement perçue comme artificielle. Une telle fluidité des échanges est préservée après la conquête britannique de la Palestine, en 1917.
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