Le tribunal administratif de Dijon a suspendu, mercredi 4 juin, l’arrêté contesté interdisant le drapeau palestinien pris par Gilles Platret, maire ex-Les Républicains (LR) de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire).
« L’arrêté porte une atteinte grave à la liberté d’expression et du commerce », a estimé le tribunal. Ce dernier avait été pris par le maire, lundi, après les « émeutes » urbaines, selon ses mots, qui ont suivi la victoire du PSG en Ligue des champions, samedi soir. « Le drapeau palestinien est devenu le signe de ralliement de bandes islamistes décidées à défier les institutions républicaines », avait alors avancé M. Platret, un ex-LR tenté, par le passé, par un ralliement à Eric Zemmour (Reconquête).
L’arrêté interdisait le drapeau dans l’espace public sur l’ensemble de la commune, deuxième ville de Bourgogne avec 45 000 habitants environ, ainsi que sa vente sur les marchés. Le maire avait immédiatement reçu le soutien du Rassemblement national (RN) et de Reconquête.
En revanche, 200 personnes, selon la police, ont manifesté contre l’interdiction lundi soir, et Clément Mugnier, responsable du Parti socialiste (PS) chalonnais, avait déposé lundi matin un référé-liberté, arguant que l’arrêté constituait « une atteinte aux libertés ». « La liberté d’un drapeau s’inscrit dans la liberté d’expression », a défendu son avocat, Jean-Philippe Morel, mercredi devant le tribunal de Dijon, dénonçant « un coup politique » de M. Platret destiné à faire « le buzz médiatique ».
Défenseur du « peuple français »
Habitué des arrêtés polémiques, la plupart du temps retoqués par la justice, M. Platret a déjà par le passé interdit des menus sans porc en 2015 dans ses cantines scolaires, tenté d’imposer l’usage du français sur les chantiers de la ville, et refusé de célébrer un mariage franco-turc, avant d’y être contraint par la justice.
« Le drapeau palestinien n’est pas l’étendard des casseurs, mais celui des défenseurs d’un peuple et de l’humanité », a ajouté Me Christophe Sgro, qui représentait des associations des droits humains se joignant au recours. « Cet arrêté stigmatise », a estimé l’avocat. Hormis samedi « onze manifestations pro-Palestine ont été organisées à Chalon avec des drapeaux et sans trouble », a-t-il souligné, accusant un « discours raciste dont le maire nous a déjà fait profiter » ; une attaque vivement dénoncée par la partie adverse.
M. Platret, qui n’était pas présent à l’audience, s’est à plusieurs reprises positionné comme défenseur du « peuple français » contre « l’épuration ethnique » que pratiqueraient des « blocs musulmans ». Le drapeau palestinien est « l’étendard de rassemblements violents », a argué Me Julie Callot, qui représente la commune de Chalon, estimant cependant que cet arrêté « interdit l’usage du drapeau à titre ostentatoire », mais qu’« on peut tout à fait manifester sans l’arborer ».