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Le ministre des armées, Sébastien Lecornu, et la secrétaire d’Etat chargée des anciens combattants et de la mémoire, Patricia Miralles, ont participé, le 7 mai, aux commémorations de la fin de la guerre d’Indochine, à Dien Bien Phu, aux côtés des responsables politiques et militaires vietnamiens. L’objectif était d’aller plus loin dans la politique de « réconciliation » entre les deux pays.

M. Lecornu et Mme Miralles s’en sont justifiés dans une tribune parue dans le journal Valeurs actuelles, le 5 mai. Ils y reprenaient les éléments de langage en vigueur depuis trente-cinq ans, parlant de deux pays « amis » qui se retrouvent, ayant une « histoire commune » qu’ils sont capables de « regarder en face ». Le choix du média peut être compris comme une tentative de s’adresser à une frange de la population qui considère encore, soixante-dix ans plus tard, que le « Viêt » reste un ennemi.

Mais, au-delà du geste symbolique d’allumer de l’encens sur un monument aux morts vietnamiens, les discours ministériels n’ont pas montré une prise en compte de la spécificité du Vietnam dans la mémoire française de son histoire coloniale. Dans le sien, Mme Miralles a même commis un lapsus en confondant « décolonisation » et « délocalisation », avant de terminer par « Vive la République ! Vive la France ! », ce qui n’a pas été repris par son traducteur vietnamien.

Célébration de la défaite

Est-ce que la célébration de sa défaite aide la France à redonner de la vigueur à la relation bilatérale ? Ou bien est-ce juste une flatterie accordée aux officiels vietnamiens dans l’espoir que Hanoï puisse avoir un rôle dans la stratégie Indo-Pacifique de la France ? Le ministre espère certainement que le Vietnam passe des commandes aux industriels français. Il a voulu tâter le terrain dans la perspective d’une prochaine visite du président de la République à Hanoï, envisagée pour la fin de 2024 ou le début de 2025.

Toutefois, contrairement aux Philippines ou à l’Indonésie, il n’y a pas de discussion pour des contrats majeurs en matière d’équipements de défense entre Paris et Hanoï. Il est donc possible que le geste symbolique du ministère des armées ait été gratuit. Et ce, d’autant que la « réconciliation » franco-vietnamienne a déjà connu plusieurs jalons depuis plus de trente ans et est bien avancée.

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Dès la réouverture du pays à la fin des années 1980, un dialogue mémoriel s’est établi : des anciens combattants se sont rencontrés et se sont même parfois rendus ensemble sur les lieux où ils s’étaient affrontés. François Mitterrand, en 1993, avait parlé de la guerre d’Indochine comme d’une « erreur » et s’était rendu à Dien Bien Phu pour un pèlerinage « franco-français ». Et ce, quelques années après ce que l’ancien ambassadeur Claude Blanchemaison avait appelé la « Marseillaise du général Giap » : la tentative de l’ancien ministre de la défense vietnamien, alors en bout de course politique, de se rapprocher de la France comme potentiel partenaire à la fin de la guerre froide.

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