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Histoires Web vendredi, septembre 20
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En observant les débats en cours autour de la guerre d’Ukraine, il est frappant d’y constater une forme de grand écart lorsque est évoquée la possibilité de négociations. A ceux qui rejettent toute perspective de dialogue au nom d’une indispensable défaite de la Russie répondent ceux qui plaident pour un règlement négocié à engager sans délai. Ainsi, entre une appréciation volontairement surjouée du rapport de force sur le champ de bataille et l’appel tout aussi irréaliste à une conférence de paix, tout se passe comme si la diplomatie avait perdu sa grammaire.

Cette dialectique du « tout ou rien » est à l’opposé de ce que doit être l’action diplomatique, fondée sur la recherche patiente et sérieuse de solutions à force d’écoute et d’ingéniosité. La diplomatie est affaire de volonté politique et de détermination. Or, aujourd’hui, une certaine forme de résignation s’est installée dans le débat public face aux conflits armés qui se multiplient. A l’image des résolutions des Nations unies sur l’Ukraine largement ignorées de tous ou des efforts impuissants pour obtenir un cessez-le-feu à Gaza, toutes les tentatives d’action diplomatique paraissent s’épuiser. La récente conférence de Bürgenstock, convoquée pour tenter d‘ouvrir une voie vers la paix en Ukraine, s’est révélée tout aussi vaine. De là à conclure que la diplomatie doit se taire et attendre son heure, il n’y a qu’un pas que nombre de responsables franchissent sans en mesurer toutes les conséquences.

Logique de puissance

C’est là que le bât blesse. En écartant la diplomatie, les dirigeants politiques s’en tiennent à une forme de gestion de crise à courte vue. Il s’agit sans doute dans leur esprit de parer au plus pressé, ce qui est compréhensible. Mais le risque est alors de laisser de côté le règlement des causes profondes de ces guerres et d’ouvrir la voie à la répétition de ces conflits, faute d’en avoir traité les raisons de fond. S’impose insidieusement dans les esprits la logique de puissance qui se trouve précisément à la source de ces conflits. En réduisant la diplomatie au silence, la guerre consolide cet affrontement des puissances. Elle en fait la nouvelle règle d’un ordre mondial déstabilisé.

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Certes, en temps de guerre, la fermeté face à l’agresseur reste la condition indispensable pour espérer mettre un terme au choc des armes. Mais elle ne saurait tenir lieu de seul viatique. L’histoire nous a appris que fermeté et dialogue doivent aller de pair. Sinon, le risque est de conduire à une impasse. Mais, aujourd’hui, en Ukraine, entre la peur de l’escalade nucléaire d’une part et, de l’autre, la crainte d’une lassitude grandissante des populations, s’en tenir à la seule carte de la fermeté place les dirigeants occidentaux devant un choix inconfortable : celui d’un conflit sans fin ou d’un cessez-le-feu probablement provisoire, avec le risque en retour d’une reprise des hostilités et d’une guerre à répétition. Faute de regarder en face les causes profondes du conflit et de chercher à y apporter des solutions, ce qui est la raison même de la diplomatie, les responsables politiques se placent eux-mêmes dans un dilemme insoluble. En période de guerre, la diplomatie doit donc avoir toute sa place, complémentaire de celle de la mobilisation militaire. Il faut simplement savoir la calibrer et l’adapter aux circonstances propres à chaque conflit.

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