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Histoires Web samedi, juillet 27
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« Ils ont enlevé le printemps, c’est terrible, non ?  » Mais qui sont donc ces « ils » ? « Ben, l’Univers !  » Voilà donc que, dans l’esprit de mon fils de 5 ans, les Forces de l’Univers, tels des super-vilains, ont supprimé le printemps, puisqu’il pleut depuis six mois et que rien ne semble être à sa place. Je n’ai pas eu le cœur de répondre que les 40 milliards de tonnes de dioxyde de carbone que les humains ont envoyées dans l’atmosphère l’année dernière participent plus sûrement au dérèglement du climat. Ma fille de 9 ans a d’ailleurs intégré ce paramètre à sa manière en m’expliquant, au mois d’octobre, qu’on entrait dans l’« étomne », étonnante contraction d’« été » et d’« automne », justifiée par le fait de suer à grosses gouttes alors que les feuilles tombaient déjà des arbres.

Il y a de toute évidence une contradiction entre ce que racontent les livres illustrés sur les quatre saisons et ce que mes enfants vivent. Leur monde est déjà différent du mien à leur âge. Pire, je sais, en partie, à quoi va ressembler leur futur, sans être pour autant versée dans la géomancie. Dans le sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) figure une frise chronologique qui va de 1900 à 2100. Elle est découpée en cinq bandes horizontales pour autant de scénarios mondiaux d’émissions de gaz à effet de serre, du plus optimiste au plus pessimiste. Au milieu de la frise, il y a la silhouette d’un enfant né en 2020.

La silhouette devient adulte dans les années 2040. Dans tous les scénarios, l’être humain représenté vit son vieil âge au milieu de couleurs qui vont de l’orange au violet foncé, une palette de carte météo sous canicule. A chaque tonne de carbone envoyée dans l’atmosphère par mes déplacements, mon chauffage, mes achats, je participe à tirer la silhouette vers le violet. Je ne suis pas pour autant devenue un être zéro carbone. Si bien que ça frotte pas mal dans mon cerveau maternel. La culpabilité climatique, il faut bien l’avouer, est très fatigante.

Récits de pays lointains

D’autres partagent ce poids, injustement réparti puisqu’il concerne les gens qui, justement, regardent la réalité environnementale en face. Comme Michael, 50 ans, qui a même contribué, à son poste de diplomate, à négocier des accords climatiques internationaux et souffre pourtant de « dissonance ». « Je sais ce qui vient, je sais trop bien l’écart béant entre ce qu’on fait et ce qu’on devrait faire – individus, collectivités et Etats. J’ai fait de mon mieux, et pourtant je n’ai pas su renoncer aux voyages, au plastique, au bœuf et au Nutella. Je mange trop, j’émets trop, je consomme trop, et je n’arrive pas à expliquer cette incohérence. Ni à moi ni à mes enfants », avoue-t-il en écrivant au Monde. Michael n’est pas seul à se retrouver dans cette inconfortable position.

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