Ces jours-ci, l’outrance dystopique de l’actualité laisse parfois le sentiment que les instruments classiques de la presse écrite – un certain niveau de langue, le sens de la nuance et de la mesure, la pondération – ne sont plus tout à fait adaptés au monde tel qu’il va. Une fois les faits rapportés, il reste souvent le sentiment que leur compte rendu n’a pas fait justice à toute leur étrangeté.
La séquence des événements qui ont scandé la journée du 20 janvier et l’investiture du 47e président des Etats-Unis en est le dernier exemple en date – même s’il est difficile de déterminer ce qui en a constitué le fait le plus dément.
Les effets de la crise environnementale participent toujours plus, eux aussi, à ce sentiment d’irréalité – qu’il s’agisse des inondations monstres qui ont ravagé, en Espagne, Valence et sa région, ou de la tempête de feu qui vient d’anéantir certains quartiers de Los Angeles.
Publiée mi-janvier, l’enquête conduite par Le Monde et une trentaine de médias européens sur les conséquences de la contamination de l’environnement par les PFAS (substances per- et polyfluoroalkylées, ou « polluants éternels ») ouvre de nouveaux horizons dystopiques à l’actualité.
Cette fois, il ne s’agit pas de destructions hors norme liées au dérèglement du climat, mais de l’énormité des opérations nécessaires à la gestion de cette pollution, qui s’accumule inexorablement dans les sols, l’eau, la faune, la chaîne alimentaire et les humains, à mesure que des PFAS sont produits et dispersés dans l’environnement.
Un gouffre financier
A Zwijndrecht, près d’Anvers, en Belgique, le désastre est tel qu’un code couleur est affecté aux quartiers résidentiels, en fonction de leur niveau de contamination. Deux employés municipaux aident les habitants à respecter toute une diversité de consignes destinées à réduire leur exposition à ces substances, répandues depuis des décennies par l’usine 3M, installée dans le voisinage.
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